En janvier 2022, les professionnels de la distribution automatique (55 000 personnes) prévoient une chute de leur chiffre d’affaires de 50%, dans un contexte d’obligation de recours au télétravail et de baisse des déplacements. L’interdiction de la consommation dans les cinémas ou dans les transports s’ajoute à cette situation. Yoann Chuffart, délégué général de la Fédération nationale de vente et services automatiques, revient sur les conséquences de cette situation.
De quelle manière le retour du télétravail renforcé pénalise-t-il l’activité de la distribution automatique ?
70% des 620 000 machines que compte le parc sont implantés en entreprise : autrement dit, en distribution automatique, 7 consommations sur 10 s’effectuent sur le lieu de travail. Avec le retour du télétravail obligatoire trois, voire quatre jours par semaine pour tous les salariés qui peuvent télétravailler, ce sont autant de consommateurs qui ne consomment plus à la machine : s’ensuit qu’avec trois jours de télétravail par semaine, ce sont les 3/5ème du chiffre d’affaires qui sont perdus chaque semaine pour le gestionnaire d’appareils.
Quelles mesures avez-vous mises en place lors des précédentes périodes de télétravail renforcé et de confinement face à la chute de la fréquentation des lieux ?
Il n’y a pas de « parade » au télétravail, a fortiori lorsque celui-ci devient la règle applicable en entreprise ! On ne lutte pas davantage contre l’application d’un protocole sanitaire spécifique par le client dans le lieu où l’on est implanté. La Fédération a eu beau éditer des recommandations pour une prestation effectuée en sécurité, et les gestionnaires ont beau être eux-mêmes des professionnels de l’hygiène, rien n’y a fait : lorsqu’un protocole était mis en place, la pause-café – ou plus généralement la consommation de nourriture et de boissons – faisait office de variable d’ajustement idéale puisque sa « suspension », avec la condamnation de la machine et/ou la fermeture des salles et lieux de pause, ne remettait pas en question le fonctionnement normal de l’entreprise ou de l’établissement client. Quant au télétravail, il allait de soi, pour ces derniers, qu’il constituait la mesure de protection la plus facile à mettre en œuvre pour assurer la sécurité des salariés tout en préservant la continuité de l’activité. Dans un cas comme dans l’autre, l’on aboutit à une situation d’inactivité subie pour les gestionnaires d’appareils.
« L’adaptation à la généralisation du télétravail constitue un défi à surmonter »
Comment les stocks sont-ils gérés durant cette période ?
Comme pour d’autres activités impactées par les restrictions sanitaires, la gestion des stocks est gravement perturbée dans ce contexte. En effet, tout est incertitude : les machines restent inaccessibles pour des durées souvent indéterminées, le retour des salariés sur leur lieu de travail est lui-même soumis à l’aléa sanitaire et il s’opère toujours de façon très progressive, tandis que le « retour au bureau » est systématiquement conditionné à la mise en œuvre de règles sanitaires visant essentiellement les lieux et moments de « convivialité », outre que la « machine » fait l’objet de défiances et que les systèmes individuels se développent en substitution. Côté industrie, le brusque ralentissement et l’éventuelle « reprise » soudaine qui s’ensuit perturbent également la gestion des stocks, au moins temporairement, dans la mesure où la demande se concentre sur le moment du rebond… Enfin, l’activité est soumise, en distribution automatique, à l’imprévisibilité de l’évolution de la situation sanitaire.
Le taux d’achat est-il devenu plus imprévisible ?
L’adaptation du secteur à la généralisation du télétravail constitue un défi à surmonter. Reste qu’en pleine crise économique, et alors que l’activité est fortement exposée à l’aléa sanitaire, il apparaît difficile pour les chefs d’entreprise de ce projet et d’envisager autrement leur activité puisque la préoccupation principale du moment est de « passer la crise ». Néanmoins, on voit ici et là fleurir de prometteuses initiatives telles que le « café à la maison ». La « premiumisation » de l’offre est aussi un vecteur d’évolution important en distribution automatique. Enfin, il semble désormais évident que le modèle économique de la profession doit lui aussi évoluer : le dépôt gratuit, le versement de commissions aux CSE, la redevance fixe versée aux clients publics, etc.
« Nous développons de nouveaux services »
Avez-vous constaté une baisse des achats sur les machines installées dans les transports ?
Evidemment. Pour mémoire, les autorités publiques ont systématiquement recommandé, en période de crise aiguë, d’éviter les transports en commun, de reporter les déplacements, etc. A cela, s’ajoute que le télétravail induit inévitablement une baisse de fréquentation des transports par les usagers, qui travaillent depuis leur domicile. Enfin, les opérateurs de transports publics ont le plus souvent proscrit la consommation de nourriture et de boissons à bord des trains, étendant souvent cette interdiction en gare. Enfin, la « machine » est désormais objet de méfiance, dans le contexte de la diffusion du virus. Dans le même temps, on n’a pas vu les ascenseurs suspectés d’être plus « vecteurs » qu’autre chose, ni même les distributeurs automatiques de billets. Rappelons également que les machines sont nettoyées et désinfectées régulièrement.
Quelles nouveautés vos adhérents ont-ils déployé ces dernières années ?
La distribution automatique est porteuse d’avenir. La digitalisation se développe, avec elle le paiement sans contact, l’achat « à distance » via une application mobile, l’accessibilité aussi avec la mise sur le marché de machines « adaptées »… L’offre alimentaire évolue aussi vers des produits plus « qualitatifs ». Certains développent en outre le service aux particuliers et même la vente de produits en nom propre. D’autres, enfin, élargissent le marché de la distribution automatique et mettent le métier au service de la restauration, du monde paysan, de la boulangerie, etc. … Les « coffee corner » fleurissent aussi.
Photo: Pixabay
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