Elaborer de nouvelles recettes, booster sa start-up, miser sur le cocktail… Focus sur les tendances fortes des spiritueux français repérées au salon France Quintessence.
« Résoudre des problèmes techniques, c’est mon job de distillateur. Les spiritueux ont très longtemps eu un discours technique, très geek, avec une valeur émotionnelle qui disparaît. A l’inverse, les gens de la parfumerie ont oublié, dans leurs propos, qu’ils travaillent avec de l’alcool », lance Nicolas Julhès. Le fondateur de la Distillerie de Paris (10ème arrondissement) a mis sur le marché trois parfums, à l’issue de deux ans et demi de travail. « Avec les normes, c’est incroyablement plus facile de lancer des produits alimentaires », s’amuse-t-il. Il a pourtant mis cinq ans à décrocher l’autorisation d’exploiter un alambic dans la capitale, chose faite depuis 2014.
Des créations de spiritueux
En parlant parfum au salon des spiritueux français France Quintessence, qui a tenu sa cinquième édition les 15 et 16 septembre à Paris, le professionnel de l’épicerie fine et des spiritueux a rappelé qu’il est possible, dans le secteur, de renouveler ses codes… tout en s’appuyant sur des savoir-faire bien établis.
Ainsi, les fondateurs de Spiritique ont plus de vingt-cinq ans d’expérience dans les spiritueux à leur actif. « Nous souhaitons être dans la création d’alcools, avec des produits innovants en termes de goût ou de design », indique Stéphane Aussel, associé et cofondateur de la structure basée à Angoulême (Charente) depuis l’an dernier. Yu Gin (43%) présente une bouteille… proche des codes du parfum. Yuzu, poivre du Sichuan, réglisse et coriandre relèvent ce gin « idéal en tonic ». Amaethon (45%) est quant à lui un whisky single malt (45%) élevé en fûts de chêne français (« pour plus de tannins ») et de bourbon (notes de vanilline). L’entreprise, qui sous-traite la fabrication des produits, recherche un distributeur.
De jeunes structures qui se développent
France Quintessence est aussi l’occasion de prendre des nouvelles de jeunes structures. A Solignac-sur-Loire (Haute-Loire), la Distillerie des Bughes attend de pouvoir lancer son whisky l’an prochain. Pour l’heure, La Grande verveine, disponible depuis novembre 2018 dans la région, est à découvrir : cette liqueur de verveine (40%) bénéficie d’une double distillation. « Mes parents font pousser les plantes dans le Puy-de-Dôme, aux Bughes », précise Bérenger Mayoux, fondateur. Le Pousse café (40%) est, lui, un spiritueux bio à base de seigle torréfié, dont l’attaque sur le cacao amer cède la place à une finale de graines de café.
A Cadaujac (Gironde), Cédrik Nadé (Maison Mounicq) a été rejoint par son frère Axel pour le lancement d’une deuxième vodka, Récolte 2018, vieillie quatre mois en fûts de Frontsac. « On récupère du tannin et du fruit », souligne-t-il. 212 bouteilles sont disponibles. Leur premier produit a obtenu quatre médailles différentes en un an. La fabrication s’effectue à Cognac.
Des cocktails pour accompagner l’armagnac
S’offrir une nouvelle jeunesse, c’est également possible. A Nogaro (Gers) , Benoît Hillion s’emploie à dépoussiérer l’image de l’armagnac. La maison Dartigalongue s’est offerte les services de Stanislas Jouenne, consultant en métiers du bar : « l’armagnac a une image de digestif, rappelle-t-il. Les producteurs veulent favoriser son emploi en cocktail. » Place, donc, à Un-Oaked (43,2%), un bas-armagnac dont l’eau-de-vie a été vieillie en cuve inox. Cet alcool blanc « tranchant et aromatique » peut s’apprécier en tonic, en spritz ou negroni revisité (eau-de-vie, Dolin ou Martini rouge, Salers ou Campari). Comme son nom l’indique, Dry-Cellar (43,4%) a été élevé en chai sec. « La part des anges est maximale. Le degré alcoolique s’abaisse fortement, compte tenu de la chaleur sous les toits », explique la maison. Un punch, ou de manière plus originale le Porthos Neck (eau-de-vie, ginger ale, bitter) ou bien encore le Brandy Crusta (eau-de-vie, Cointreau, Noyau de Poissy ou Maraschino, jus de citron jaune) peuvent permettre de le découvrir en cocktail.
Des maisons qui réinvestissent les bars et cavistes
Actualité chargée pour Les Nouveaux distillateurs, l’entité de distribution de produits craft de Pernod Ricard. Elle remet en avant, auprès des cavistes et bartenders, les armagnacs de Comte de Lauvia, fabriqués depuis 1938 à Eauze (Gers). « Le respect du terroir, la typicité des cépages et la maîtrise des élevages définissent cet armagnac unique », indique l’entreprise. Pour faire découvrir la structure de l’armagnac, l’ugni blanc, le baco blanc et la folle blanche ont été présentés séparément aux visiteurs. Les produits sont embouteillés dans le chai. Trois références – Fine Armagnac, Armagnac Réserve (eaux-de-vie des années 2001 à 2009) Armagnac hors d’âge (eaux-de-vie de 1973 à 2000) – sont proposées.
Créée en 1643, Augier, la plus ancienne des maisons de cognac, a pour sa part bénéficié d’une refonte totale de sa gamme en 2015 autour de trois références (l’Océanique, le Singulier et le Sauvage) qui sont aujourd’hui proposées aux établissements premium, notamment pour les cocktails : highball pour l’Océanique, ou bien old fashioned pour le Sauvage.
Du sur-mesure
Pernod Ricard pousse par ailleurs les feux sur La Distillerie générale, un projet du groupe concrétisé en novembre 2017, avec une sélection de fûts ou de batchs uniques effectuée par les maîtres assembleurs et distillateurs de ses différentes maisons. Les bouteilles de 35 cl, calligraphiées, constituent un code commun à l’ensemble de la gamme, dont les stocks de chaque produit sont volontairement limités.
L’abus d’alcool est dangereux pour la santé. A consommer avec modération.
Photo de couverture : Eric Perez/France Quintessence
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