« Les recettes apportées par les publicités alimentaires représentent environ 1,4 milliard d’euros chaque année pour les chaînes, sommes dépensées à plus de 80 % pour des aliments dont il est souhaitable de limiter la consommation. En soulevant cette question économique, ils ont nié l’influence de la publicité alimentaire télévisée sur les comportements alimentaires des enfants, les comportements d’achats des parents et leurs conséquences sur l’état nutritionnel », expliquent les signataires d’une lettre ouverte adressée à la ministre de la Santé Roselyne Bachelot.
En lançant ce pavé dans la mare, vingt-trois sociétés savantes de cardiologie, diabétologie et pédiatrie soutiennent l’initiative de Roselyne Bachelot d’oeuvrer en vue d’une potentielle réforme de la publicité alimentaire à la télévision, en particulier au sein des programmes destinés aux enfants. Diverses associations de personnes obèses ou de parents d’élèves s’adjoignent au texte présenté par des médecins, et souhaitent que les projets de la ministre de la Santé puissent arriver à leur terme. Car la ministre de la Culture et de la Communication Christine Albanel a préféré prendre les devants en tentant d’instaurer une charte de dix engagements issus du travail conjoint des chaînes, annonceurs et producteurs.
Les 4-14 ans ont beau passer 2 heures 15 devant le petit écran par jour, pas sûr qu’une restriction massive des messages ne parvienne à réguler le taux d’obésité chez les jeunes. En Suède, où la pub en direction des moins de 12 ans a toujours été interdite, le taux d’obésité chez les jeunes est de 18 %. Même constat au Québec, où la réclame à destination des enfants est bannie depuis 1980, ce qui n’a pas empêché le taux de surpoids de progresser de 11,5 à 29,4 % en l’espace de dix ans… C’est pourtant un des projets de Roselyne Bachelot: supprimer la publicité pour les produits « gras, sucrés, salés » de 7 heures à 8 heures 30, de 12 à 14 heures et de 17 à 19 heures, à l’exception d’une liste d’aliments autorisés car plus « acceptables ».
Cependant, nombre de grands industriels ont déjà restreint leurs achats sur les plages jeunesse, préférant investir sur des tranches plus familiales et fédératrices. Une telle décision ne reviendrait donc qu’à déplacer le problème, et à fermer à des industriels moins gros l’opportunité d’annoncer en télévision à des tarifs plus abordables. De plus, le modèle économique de la pléthore de chaînes destinées à la jeunesse serait remis en cause, dont la gratuite Gulli, dépendant quasi-exclusivement de ses recettes publicitaires en dépit de la présence au capital de France Télévisions. Lagardère Active tient cependant à préciser qu’elle ne serait impactée « qu’à » hauteur de 15,8 % de son chiffre d’affaires. La famille alimentation représente 40 % du chiffre d’affaires de la chaîne jeunesse. Selon l’institut de mesure Yacast, le canal le plus affecté serait Planète Juniors, qui pourrait perdre jusqu’à 48,5 % de son chiffre d’affaires.
Afin de lutter plus efficacement contre l’obésité, des actions de terrain pourraient aussi être envisagées. Une étude de l’Assurance maladie réalisée en 2005 indiquait que c’est parmi les enfants d’ouvriers spécialisés et d’employés de bureau que la proportion d’obèses est la plus élevée…