Les difficultés économiques actuelles amplifient les facteurs de stress des dirigeants. Les patrons de petites et moyennes entreprises figurent parmi les plus exposés.
51% des dirigeants de PME déclarent se sentir plus stressés en 2010 que l’an dernier. Les résultats d’une étude Grant Thorton/Experian Business Strategies Ltd. menée dans 36 pays le confirment : les patrons de petites et moyennes entreprises confirment subir les conséquences des difficultés économiques et sociales, affectant par conséquent leurs décisions. « Une concurrence de plus en plus agressive, des liquidités en baisse, un manque de visibilité à court et moyen termes sont des facteurs qui ont accru la pression des dirigeants, entraînant souvent un manque d’empathie, des prises de décisions non réfléchies et impulsives », explique un des associés du cabinet d’audit, Jean-Jacques Pichon.
Même tendance au niveau mondial : 56% des dirigeants font part d’un accroissement de leur niveau de stress, les chefs d’entreprise chinois, mexicains, grecs et espagnols étant les premiers concernés… aux antipodes des suédois ou des danois. Alors que la Chine a connu une croissance fulgurante ces dernières années mais doit faire face à d’importants bouleversements sociaux (mondialisation, urbanisation), et que la Grèce et l’Espagne traversent une situation financière particulièrement délicate, les chefs d’entreprise, aux avant- postes de l’état de la consommation et rivés sur les indicateurs, sont le reflet de ces difficultés par les craintes qu’ils expriment.
Dans une enquête menée par l’Observatoire des PME d’Oseo, en 2006, 57% des dirigeants de PME estimaient que leur état de santé était impacté par l’activité de leur société, un chiffre qui grimpait à 66% dans le BTP et 72% pour le commerce de détail (pour les entreprises employant moins de neuf salariés). Les artisans figurent donc parmi les professionnels les plus exposés au stress, les résultats de leur entreprise impactant dans de nombreux cas directement leur mode de vie, le patrimoine personnel pouvant être mis en jeu.
Les turbulences économiques, qui touchent l’activité et les résultats des firmes, sont un nouvel élément qui s’ajoute à la longue liste des facteurs de stress pour les chefs d’entreprise. L’investissement de ces derniers sur leur lieu de travail constitue un des « risques » les plus courants pour les dirigeants : il s’élève en moyenne à 55 heures en moyenne par semaine dans les entreprises de 3 à 9 salariés et 57,5 heures en moyenne par semaine dans les PME de 10 à 249 salariés. La majorité des patrons de PME, en particulier au sein des plus petites structures, déclaraient par ailleurs régulièrement travailler le week-end, allongeant de facto le quota horaire consacré à la sphère professionnelle. 35% des dirigeants se disaient par ailleurs « assez souvent » fatigués.
« Le patron de PME est souvent seul à décider, surtout dans les structures de moins de 20 salariés, où il n’y a pas forcément de management intermédiaire », rappelle aux Echos la directrice générale de Mercuri Urval Développement, Nathalie Steinberg. Ce cabinet est spécialisé dans l’accompagnement d’équipes dirigeantes. La structure de gouvernance propre aux grands groupes, propice à la ventilation des fonctions de direction, ne se retrouve pas dans les petites et moyennes entités, pour qui un seul homme ou une poignée d’associés occupent ces postes et possèdent l’entreprise. Leur responsabilité est donc, en plus de la conduite quotidienne de l’activité, d’en assurer le financement et la viabilité sans véritablement pouvoir déléguer certaines tâches.
De multiples contraintes lors de la création d’une entreprise
Le passage d’une profession donnée à la direction d’une société constitue par ailleurs un des facteurs de stress les plus forts pour les nouveaux entrepreneurs, qui doivent appréhender un ensemble de contraintes propres à la gestion d’une structure… et relativement éloignés de leur cœur de métier. Le désir d’indépendance – être son propre patron – se heurte au poids de l’entreprise nouvellement créée, qui nécessite une attention de tous les instants : difficultés de financement au démarrage, formalités administratives, location ou acquisition de locaux et de matériel, premières embauches…
Des tâches auxquelles il est particulièrement difficile de se préparer. L’externalisation de certaines fonctions support (administration du personnel, comptabilité) est possible, mais le coût peut apparaître comme un frein. Le développement commercial et la production sont, sans surprise, les tâches préférées des dirigeants, la comptabilité et l’informatique étant relégués dans les profondeurs du classement.
Toutefois, au-delà de cet élargissement des tâches, la nécessité permanente de porter l’activité de l’entreprise et de faire face à de multiples aléas (économiques, techniques…) sans véritable appui humain ou financier reste le principal déclencheur de stress chez les patrons de PME, qui peinent à dissocier vie privée et vie professionnelle.