Les mesures d’austérité annoncées, censées réduire le déficit public, risquent d’entraver la croissance.
La « rilance » ! Ce nouveau terme, dont la ministre de l’Economie Christine Lagarde est à l’origine, est censé représenter le modèle de politique économique qu’entend poursuivre le gouvernement dans les mois à venir : un mélange de rigueur et de relance, à mi-chemin entre économies et poursuite de mesures censées stimuler la croissance. Concrètement, « il faut mener des réformes de fond telles que la réforme des retraites et relancer l’économie en insistant sur l’investissement et l’innovation », a-t-elle expliqué.
Afin de soutenir la croissance – l’Insee table sur 1,4% en 2010, après une baisse de 2,5% l’an dernier –, un ambitieux portefeuille de mesures multisectorielles avait été mis en place mi-2009. Un an plus tard, dans le but de ramener le déficit de 7,9% du PIB cette année à 3% en 2013, et en ayant pour objectif d’assainir les comptes, de nombreuses coupes budgétaires seront pratiquées par l’Etat. Economiser 100 milliards d’euros en l’espace de trois ans afin de respecter les engagements pris et les critères de Maastricht s’annonce délicat pour le gouvernement, qui devra veiller à ne pas trop affecter la consommation des ménages.
« Le taux de chômage élevé, le retrait progressif des mesures de relance et l’effort de consolidation des finances publiques, imminent en France comme chez ses partenaires commerciaux, vont peser sur la demande », mettait en garde, dans une note publiée le mois dernier, le Fonds monétaire international. L’institution appelle à respecter ce subtil équilibre entre rabot et coups de pouce (dont la prime à la casse, au montant récemment abaissé, constitue l’exemple le plus représentatif en matière de soutien à une filière). Dans la zone euro, l’actuelle faiblesse de la monnaie constitue toutefois un heureux événement en matière de commerce.
Deux objectifs à mener de front
Le gouvernement se retrouve pris donc pris en étau entre deux nécessités : soutenir une économie encore fragile et rassurer les marchés ainsi que les autorités européennes en avançant à marche forcée pour maintenir ses objectifs. Les réformes de fond, à l’instar de celle menée sur les retraites, ne produiront pour leur part leurs effets qu’à long terme, mais témoignent d’un activisme bienvenu dans le contexte actuel.
Les conséquences des plans drastiques menés au Japon dans les années 1990 ou aux Etats-Unis après la crise de 1929 restent encore dans les esprits, même si le contexte économique a profondément évolué. Emploi et pouvoir d’achat en berne sont à-même de provoquer un ralentissement de la consommation, voire un attentisme quant à d’éventuelles futures baisses de prix de la part des commerçants… d’où l’apparition potentielle d’une véritable spirale déflationniste. Sans aller jusqu’à évoquer un scénario aussi catastrophiste, le gouverneur de la Banque de France explique, dans une interview au Figaro qu’aujourd’hui, « le principal risque pour la croissance, c’est que les ménages, vous, moi, nous ayons peur que pour rétablir l’équilibre, il faille augmenter massivement les impôts». La seule perspective d’un plan de rigueur particulièrement poussé peut engranger une paralysie de la consommation.
L’exemple grec en ligne de mire
Parallèlement à ce volet, l’enjeu consiste à maintenir la notation de la France à la note maximale (AAA) afin d’éviter un enchainement tel qu’observé ces dernières semaines en Grèce (dont le déficit public estimé pour 2009 s’élève à 12,7%). En rappelant que « l’assainissement devra s’amorcer en 2011 dans les économies avancées, et plus tôt encore dans les pays actuellement aux prises avec d’importants déficits budgétaires », le G20, dans sa déclaration finale rendue fin juin, se contente d’évoquer brièvement un tel scénario, pourtant redouté par de nombreux Etats, et ce même en-dehors de la zone euro. La France, avec un déficit à 7,9% du PIB, n’est pas si loin du Portugal (9,3%), affecté en mars dernier par une dégradation de la note de sa dette souveraine, laissant également planer des risques pour l’Espagne (11,4%) ou l’Irlande (11,7%) : les « PIGS » plombent l’image de la zone euro.
Le plan de sauvetage de la Grèce, à l’austérité si forte qu’elle risque d’entraver de manière durable les capacités de rebond du pays, permet de mettre en exergue la nécessité d’engager les mesures qui s’imposent pour assainir les finances publiques, mais à un prix toujours sujet à débat.