La remise en cause du subventionnement de l’énergie solaire plonge le secteur dans un marasme sans précédent. Les firmes accusent le coup.
Sale temps pour le photovoltaïque. Si les intempéries estivales ne sont pas incriminées, les atermoiements des autorités sur les conditions d’exploitation de l’énergie solaire sont en revanche en cause, en France mais également en Allemagne ou en Italie pour ne citer que ces trois pays ayant réduit les tarifs d’achat de l’électricité produite. Un accroissement des capacités mondiales de production de 150% sur l’année 2010 a provoqué, in fine, une surcapacité de production, des stocks trop importants et donc entrainé un recul des prix de vente.
Selon le volume de puissance installé au trimestre précédent, la Commission de régulation de l’énergie fixe désormais tous les trois mois, en France, les tarifs d’achat pour le photovoltaïque. L’ensemble de ces derniers a ainsi été abaissé, dans le courant de l’été, pour les installations inférieures à 100 kW intégrées au bâti. S’échelonnant de 7,5% à 9,5%, ces baisses portent un nouveau coup à la filière de l’énergie solaire, déjà échaudée par un cadre réglementaire en mouvement quasi-permanent.
Courant août, une seconde nouveauté est intervenue sur ce marché : les ministères de l’Ecologie et de l’Economie ont publié un « cahier des charges simplifié » relatif aux appels d’offres étant désormais obligatoires pour les installations sur bâtiments comprises entre 100 et 250 kilowatts-crête, soit une surface de toiture s’étendant de 1.000 à 2.500 m². Seules les installations d’une dimension inférieure à 1.000 m² peuvent désormais bénéficier de tarifs d’achat préalablement fixés. Les candidats devront proposer leurs prix de vente de l’électricité qu’ils produisent, les moins-disants étant logiquement destinés à l’emporter. Cette nouvelle procédure permettra de développer plus rapidement d’importantes capacités de production, moins éclatées, selon le ministère de l’Ecologie.
Ces dispositifs interviennent dans un contexte de crise pour la filière photovoltaïque, qui subit encore le contre-coup du moratoire instauré en décembre dernier pour lutter contre l’accroissement difficilement contrôlé des capacités de production, tiré par les perspectives de rentes fournies par le l’achat de l’énergie. Les signatures de contrats d’obligations d’achat d’électricité ont été interrompues jusqu’en avril, provoquant une chute de 44% du nombre de dossiers déposés. Les raccordements au réseau EDF ont été suspendues.
PME ou grandes entreprises, même constat
Si la bulle spéculative a été crevée, les professionnels restent toutefois particulièrement affectés par cette décision qui avait surpris nombre de spécialistes du secteur. A Vannes, France Panneau solaire, une PME qui employait 200 salariés au moment du moratoire, a dû se résoudre à licencier près de la moitié de ses effectifs, rapporte Ouest-France. Particuliers et entreprises se sont désistés en découvrant les nouvelles règles fixées par l’Etat. Au 1er juillet, les tarifs apparaissant dans les contrats signés avec EDF avaient reculé, sur un an, de 60% pour les entreprises et de 20% pour les particuliers.
Pour Arnaud Gossement, avocat spécialisé en droit de l’environnement, « le gouvernement a cassé la confiance que les investisseurs avaient dans le marché du photovoltaïque ». Il a également abordé, mi-août dans La Dépêche du Midi, des « petites sociétés se sentent trahies et ont le sentiment de devoir payer pour d’autres. Cette politique du yo-yo a entraîné une vague de licenciements dans tout le secteur. Des particuliers se retrouvent dans une situation d’endettement ». Quand bien même les emplois verts sont supposés représenter des pistes d’avenir, la filière photovoltaïque détruit, en France, plus d’emplois qu’elle n’en crée. La ministre de l’Ecologie Nathalie Kosciusko-Morizet souhaite, pour redresser la barre, favoriser l’innovation parmi les firmes françaises.
Les sociétés françaises ne sont pas les seules à faire les frais de cette instabilité. Au niveau mondial, le prix des panneaux solaires a baissé de 20% en six mois. Le subventionnement de la filière est, dans de nombreux Etats, remis en question, les gouvernements s’interrogeant notamment sur la destination finale des fonds accordés. Les entreprises chinoises tirent en effet leur épingle du jeu sur ce marché. L’allemand Q-Cells témoigne de cette situation : il va procéder à la délocalisation d’une partie de sa production suite à d’importantes pertes.
Tout n’est pas sombre pour autant. L’accident nucléaire de Fukushima a de nouveau permis une mise en exergue de l’apport, pour l’environnement, des énergies renouvelables. D’importants mouvements capitalistiques – Total et SunPower, par exemple – se sont déroulés ces derniers mois, leurs acteurs tablant sur l’engouement pour cette source et leur capacité à se distinguer en termes de qualité des produits. Ils espèrent, secrètement, un ensoleillement plus fort sur leur activité…