Les consommateurs retrouvent le chemin de rayons délaissés au plus fort de la crise. Décryptage des dernières innovations et des stratégies commerciales mises en place.
Des plats cuisinés frais à +14% en volume au premier trimestre et les salades fraîches en progression de 7%… Les dernières performances du rayon traiteur ne sont qu’un aperçu d’une tendance engagée depuis le début de l’année en matière de grande consommation : un redémarrage des ventes ! Sur les trois premiers mois de l’année, le chiffre d’affaires des hypermarchés et des supermarchés croît de 3,4% en volume et de 4,4% en valeur, selon l’institut Iri. Les achats de produits de grande consommation devraient augmenter de 1% à 2% cette année.
Ces chiffres sont d’autant plus surprenants qu’ils interviennent dans un contexte généralisé de ralentissement de la consommation des ménages, comme démontré fin avril par l’Insee : dépenses de consommation des ménages ont reculé de 1,9% au premier trimestre… même si on constate une nette reprise en mars.
L’alimentaire serait-il de nouveau devenu prioritaire pour les consommateurs ? Tout porte à le croire, comme en témoignent les ventes des produits à marque de distributeur, principalement développées sur cette branche. En 2009, les ventes des grandes marques ont reculé de 3,9%… et celles des MDD de 3,2%. Les moyennes gammes, délaissées au cœur de la crise au profit des premiers prix et du haut de gamme, reprennent leurs droits.
Attention toutefois à la surenchère en la matière, prévient Thierry Desouches, porte-parole de Système U : « Si les marques de distributeurs sont trop présentes, le consommateur y voit une perte de choix, il a l’impression que le distributeur choisit un peu à sa place », expliquait-il récemment dans un entretien accordé à l’AFP. Ces produits ont toutefois été un moyen efficace pour contrer le hard-discount, qui a contre toute attente dévissé ces derniers mois. Le pouvoir d’achat des ménages ne s’est pas amélioré de manière significative au cours du dernier semestre… mais la riposte organisée par la grande distribution a porté ses fruits. Au menu : mise en place de produits premier prix d’attrait et renforcement du cœur de gamme, avec innovations à la clef.
Nouveauté, proximité et nomadisme
Les nouveautés ne se sont pas faites attendre : pour convaincre un consommateur désireux de surveiller son budget et attentif au développement durable, les distributeurs ont proposé de nouveaux mécanismes promotionnels (Carrefour et sa « Promo libre ») ou innové en matière de merchandising : ainsi, Auchan a déployé dans la quasi-totalité de ses hypermarchés son rayon self-discount, en rodage depuis 2002. Le concept s’est progressivement affiné pour s’orienter vers les gros volumes et le vrac, point fort de ces zones ressemblant à s’y méprendre aux maxidiscompteurs.
Autrefois, on s’approvisionnait en lait auprès de son épicier ; aujourd’hui place au vin, au sucre et à la farine. « L’avantage économique est certain. Pour le consommateur comme le commerçant. Vous optimisez la gestion des stocks et mettez plus de produits au mètre linéaire qu’avec des produits sous blister », indique à l’hebdomadaire spécialisé LSA Thierry Anselin, DG de l’enseigne de bricolage Brico Pro, dont la vente en vrac est la marque de fabrique. Les clients ont davantage l’impression de maîtriser leur consommation, et se servent sous une forme ludique. A noter, par ailleurs, l’attachement porté au commerce de proximité, et plus particulièrement les supermarchés : Carrefour Market a ainsi enregistré de remarquables performances en année 1.
Prochaine tendance pour pousser les ventes des produits de grande distribution : le nomadisme. La timbale de légumes Daucy et les pizza-cônes de l’espagnol Conelnn viennent s’engouffrer dans une brèche notamment ouverte par Agis ainsi que Sodeb’o et sa PastaBox aux ventes aussi inattendues que le produit. A tel point que tous les industriels de l’alimentaire veulent s’y engouffrer… Le goût de la consommation semble de nouveau se répandre dans tous les sens du terme.