Pour Olivier Maillot, consultant-formateur en gestion des conflits, la crise peut exacerber les situations d’agressivité en entreprise. Les sociétés misent sur la formation pour sensibiliser leur personnel et prévenir le mal-être au travail. Il répond aux questions de Business & Marchés.
Business & Marchés − Quel constat vous a incité à lancer une activité de consulting et de formation en gestion des conflits ?
Olivier Maillot − D’un point de vue global, nous pouvons dire que l’augmentation croissante des actes d’incivilités et de violence, le sentiment d’insécurité ambiant m’ont conduit à entreprendre dans ce secteur d’activité. Quelles sont les solutions pour faire face aux conflits ? Quels sont les axes de travail à déployer en interne ? Les recours possibles ? Le but des formations est de répondre à ces questions, d’aborder les conflits et les situations d’agression sous un nouvel angle, de « re » prendre confiance en soi et d’avoir un mode opératoire pour réagir lors d’une interaction difficile.
Business & Marchés – Sur quelle expérience fondez-vous ce constat ?
Olivier Maillot − J’ai toujours été passionné par les relations humaines, notamment en situation complexe. J’ai donc construit mon cursus professionnel afin de répondre à mes interrogations. J’ai d’abord intégré l’administration pénitentiaire (qui est un véritable observatoire des relations humaines poussées à leur paroxysme), puis j’ai rejoint une multinationale en qualité de responsable sûreté-sécurité. Ces expériences m’ont permis d’affiner ma démarche et développer mon activité. Chaque organisation possède des problématiques différentes.
« Les conditions de travail peuvent s’améliorer en prévenant les conflits et en accompagnant les salariés »
Business & Marchés − Selon vous, quels éléments expliquent l’intérêt croissant porté à cette thématique, notamment par les entreprises ?
Olivier Maillot − Les conflits et les actes d’agressivité et de violence ont de vrais enjeux tant sociaux qu’économiques pour les entreprises. Je pense que ces dernières en ont conscience et souhaitent faire évoluer les choses. La mise en place de processus internes, l’accompagnement des salariés dans leurs démarches préventives et administratives et la prise en compte du risque d’agression symbolisent l’engagement de la société et favorisent un climat d’écoute et d’entraide.
Les conditions de travail peuvent s’améliorer, ce qui peut favoriser l’implication et la cohésion des salariés afin d’influer sur la productivité. C’est ce qui explique, selon moi, l’intérêt croissant pour cette thématique. Nous sommes sur des notions de responsabilité, d’implication, de motivation et de bien-être au travail.
Business & Marchés − Les tensions économiques actuelles exacerbent-elles, selon vous, les conflits et le stress ?
Olivier Maillot − Chaque interlocuteur joue un rôle décisif dans un échange conflictuel ou violent. Pour mieux cerner les phénomènes d’agressivité il est nécessaire de prendre en compte les facteurs de contingence. Les tensions économiques actuelles en font certainement partie. La personne qui attend une lettre ou un mouvement financier sur son compte aura forcément un niveau de réaction et de frustration fort lorsque l’hôtesse d’accueil lui indiquera qu’il n’est pas dans le « bon » bureau, sans parfois un regard.
La crise influe sur ce niveau de la situation, elle diminue la capacité à prendre du recul par rapport à une situation et exacerbe les réactions car il y a peu de marge de manœuvre pour l’individu à cet instant « T »… Pour autant, les tensions économiques ne doivent pas être – ou devenir une excuse pour l’adoption d’un comportement violent, auquel cas les actes d’agression deviendraient légion. Ces personnes ont choisi d’aller plus loin dans l’escalade, de passer à l’acte violent. Elles sont responsables de l’agression commise sur une autre personne avec toutes les conséquences que cela entraîne.
Le but d’une formation en gestion des conflits ou de l’agressivité est d’ouvrir des solutions là où il ne semble pas y en avoir, de développer des perspectives et de « re » créer une relation. Chaque individu influe sur la situation, chacun doit donc mesurer et maîtriser ses actes afin de trouver une issue au blocage. Lorsqu’une personne est consciente des ressorts psychologiques et comportementaux au cours d’une situation conflictuelle, il est plus simple de donner un sens et de s’en sortir.
« Elaborer un processus cohérent »
Business & Marchés − Quelles sont les principales demandes exprimées par vos clients ?
Olivier Maillot − J’interviens généralement sur trois leviers complémentaires. Tout d’abord, les missions de conseil et d’accompagnement dans les processus internes de sûreté-sécurité, avec une prise en compte des risques inhérents à certains métiers. Il s’agit de construire, de mettre en place et de faire vivre un processus de prévention et de lutte contre les actes d’incivilités ou de malveillance.
Dans un second temps, il s’agit de sensibiliser et former les personnels aux situations de conflit, d’agressivité et de violence. Ces sessions de formation ont pour objectif de favoriser l’acquisition de réflexes comportementaux et l’adoption des consignes et procédures internes tout en appliquant une méthodologie simple lors d’une situation de crise relationnelle. Enfin, il est nécessaire de maintenir ces acquis organisationnels et comportementaux en vérifiant leur cohérence dans les pratiques professionnelles.
Olivier Maillot édite un blog, « Face au conflit », consacré à la gestion des conflits, du stress et de l’agressivité ainsi qu’un site dédié à son activité, Imself.
Photo : Stock image of person wearing business suit and boxing gloves par Shutterstock/Iodrakon