Trois chefs parisiens, à la tête de restaurants bistronomiques et gastronomiques, reviennent sur la première semaine du couvre-feu, désormais étendu. Le service du soir a du plomb dans l’aile, à moins de chercher à s’adapter selon l’emplacement.
Depuis le vendredi 23 octobre à minuit, 54 départements français sont concernés par les mesures de couvre-feu s’appliquant de 21 heures à 6 heures, pour une durée de six semaines. Une nouvelle contrainte déjà expérimentée depuis le samedi 17 octobre en région Ile-de-France et dans huit métropoles. Les restaurateurs, soumis à un protocole sanitaire renforcé, ont dû s’adapter à ces nouveaux horaires. D’après le cabinet spécialisé Food service vision, 50% du chiffre d’affaires réalisé par la restauration commerciale s’effectue sur le service du soir. Avant l’extension géographique des restrictions, l’impact était estimé à une perte allant de 38% à 67% des occasions de consommation du soir, selon la réaction des clients et des établissements.
Ouvrir le soir ou non, nouvelle question
Trois chefs parisiens nous décrivent leur adaptation au cours de la première semaine, parmi lesquels Julien Boscus, du restaurant gastronomique Origines, dans le 8ème arrondissement. Le déjeuner a été rallongé d’une demi-heure jusqu’à 14h30. “Nous fermons le soir pour le service du dîner, car nous ne souhaitons pas servir pour l’instant à 18h30”, indique-t-il. Une offre de vente à emporter sur commande est disponible jusqu’à 20 heures. Même principe au restaurant Dupin, tenu par Nathan Helo dans le 6ème arrondissement, désormais fermé en début de semaine le soir. Un happy hour avec du champagne de vignerons et des planches a été créé du jeudi au samedi. Autre nouveauté, l’ouverture le dimanche autour d’un brunch végétal.
Servir un dîner à l’heure de l’afterwork, tel est en revanche le choix de Julia Sedefdjian, cheffe du restaurant Baïeta, dans le 5ème arrondissement : une ouverture de 18 heures à 20h30 avec un menu unique en quatre services, baptisé Paris-Nice, doté d’une entrée, d’un plat de viande, d’un plat de poisson et d’un dessert pour 69 euros. Le déjeuner s’effectue avec une carte réduite.
Des équipes au chômage partiel par endroits
Ces nouveaux horaires et la reconfiguration des menus affectent l’organisation des différents services. Chez Origines, les équipes, en effectifs réduits, travaillent le matin. l’après-midi, le chef pour réaliser l’offre de vente à emporter avec l’aide d’une stagiaire. Le soir, les équipes sont en chômage partiel. Au restaurant Dupin, l’équipe est passée de huit à trois personnes. “Nous travaillons du mardi au dimanche, mais avec deux soirées en moins. Mais en étant deux en cuisine, nous devons redoubler d’efforts pour la mise en place et le service”, témoigne Nathan Helo. Chez Baïeta, pas de changements dans l’équipe.
Une situation plus délicate dans les quartiers d’affaires
Le plus difficile, pour ces passionnés de cuisine et entrepreneurs, est de répondre aux nouvelles habitudes des clients. “Le soir est compliqué, dans cette période bouleversée avec le Covid. Nous sommes dans un quartier d’affaires et avons perdu notre clientèle le soir, d’où notre volonté de fermer. Le déjeuner marche toujours bien, car nous sommes accessibles et gastronomiques dans notre offre, nous arrivons toujours à séduire notre clientèle et à maintenir notre activité. Nous avons juste amplifier l’horaire du déjeuner pour que chacun puisse prendre plus de temps. Nous réfléchissons à une nouvelle offre pour le soir, car nous aimerions vraiment avoir une activité sur ce créneau”, explique Julien Boscus, depuis la rue de Ponthieu, entre les Champs-Elysées et Miromesnil. Son restaurant était déjà fermé le week-end.
“Nous avons un service en moins, donc une fréquentation de -50% évidente et naturelle. Mais les clients sont présents au déjeuner. Et nous attendons de lancer nos nouvelles offres pour voir si la clientèle sera séduite par ces nouveaux formats. Les habitudes n’ont pas changé, les gens consomment encore et c’est tant mieux ! Ils sont juste privés de dîner”, observe pour sa part Nathan Helo, dont le restaurant bistronomique est situé à proximité du Bon Marché.
“Au dîner, il y a moins de clients car les Français n’ont pas l’habitude de dîner aussi tôt mais on espère que les habitudes changeront. Mais on ne lâche rien et nous n’ avons eu que des bons retours concernant notre nouveau menu du soir”, constate Julia Sedefdjian, près de la station de métro Maubert-Mutualité. Un moyen de transport qu’il convient désormais d’emprunter sans s’attarder…
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