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Comment Drinks & Co a insufflé une nouvelle personnalité à sa carte de cocktails

6 min de lecture
Drinks & Co - Bartenders - Avril 2022

En déclinant ses cocktails simultanément avec et sans alcool sous forme d’une collection dédiée aux sept péchés capitaux, le bar de Drinks & Co, à Paris, affirme son positionnement mixo, malgré son implantation au sein d’un caviste plus généraliste.

A Paris, le concept de la boutique de Drinks & Co s’exprime pleinement depuis un an. Ouvert en décembre 2020, en période de restrictions, le magasin situé au pied de la gare Saint-Lazare (8ème arrondissement) associe un caviste, un bar et une offre de masterclasses. Le lieu (1300 références de vins et spiritueux) permet de donner de la visibilité à la plateforme d’e-commerce du même nom. Pernod Ricard est l’actionnaire de l’entreprise, mais Drinks & Co bénéficie de ses propres assortiments. Une nouvelle carte de cocktails vient d’être créée au bar, toujours sous forme d’une offre “miroir”, comme l’avait mis en place Guillaume Guerbois au démarrage.

“Nous avons conservé les cocktails conçus avec et sans alcool, mais nous avons ajouté le concept des sept péchés capitaux. Cela permet de changer leur perception, puisque le péché ne consiste plus forcément à boire de l’alcool, grâce à cette offre. Nous avons aussi simplifié les préparations, désormais utilisées pour plusieurs cocktails. Lancer cette carte a été un beau challenge, avec beaucoup de mouvements de personnel en parallèle”, expliquent Maxime Brisville, senior bartender et Sylvain Escudié, assistant F&B manager. Un menu conçu par l’ensemble de l’équipe du bar, ainsi qu’avec Cédric Horrach, qui a quitté son poste il y a quelques semaines.

Des recettes qui tranchent

La gourmandise, la paresse, la colère (avec une recette qui se veut puissante, amer et torréfiée), la luxure, l’orgueil (avec un cocktail “miroir” pétillant, floral et amer), l’avarice (frais, exotique, épicé) et l’envie (pétillant, rafraîchissant, fruité selon la description) sont représentées, avec systématiquement la même recette déclinée avec et sans alcool, au même prix (14 euros).

Cocktail Paresse - Drinks & Co - Nouvelle carte (mars 2022)

Paresse

Pour retranscrire la paresse en cocktails, “nous nous sommes inspirés du film The Big Lebowski, en incitant à profiter du moment”, s’amusent les deux bartenders. Très long et sans glace, il permet de prendre le temps de le déguster. Ce drink herbacé et floral présente de très belles notes végétales au nez. Avec l’aide du maître-brasseur de La Parisienne (dont une sélection de bouteilles est disponible), un cordial (sirop) de houblons (Ekwanot, Saaz et Huell) a été crée – des pellets sont utilisés pour faciliter la conservation. Un moyen de répondre aux questions sur l’absence, volontaire, de bière à la pression. De l’extrait de thé facilite la tenue de la généreuse mousse, induisant une dualité de textures très originale. A la dégustation, le cocktail est, passé cette première étape, très minéral. L’équipe du bar réalise sa propre solution acide. De l’aquavit, peu utilisé dans les bars parisiens, est proposé dans la version alcoolisée (Ceder’s Wild, un “spiritueux sans alcool”, dans la version soft).

Cocktail Luxure - Drinks & Co - Nouvelle carte (mars 2022)

Luxure

Une dimension “assez sensuelle et suave” est à découvrir par l’intermédiaire du cocktail dédiée à la luxure, résolument pimenté (au risque d’anesthésier le palais pour un deuxième drink). Du paprika est disposé, en rim, sur le verre, renforçant la dimension très puissante de la création, d’un rouge profond. De la vodka (ou du Fluère original couplé à de l’absinthe sans alcool signée Lyre’s) entre dans la recette, tout comme un sirop maison (poivron rouge, piment d’Espelette). En bouche, l’impression immédiate est de croquer un poivron. Une dizaine d’essais ont été nécessaires à la mise au point de la recette créée par Mathis, bartender chez Drinks & Co. “Le vinaigre de Xérès apporte une légère acidité”, contrecarrent Maxime Brisville et Sylvain Escudié. Un cocktail très chaud dans l’esprit, à découvrir avec précaution.

Cocktail Gourmandise - Drinks & Co - Nouvelle carte (mars 2022)

Gourmandise

Bien plus consensuel, le cocktail dédié à la gourmandise (en short drink, toutefois) est servi avec une petite pochette de pop-corn. Une agréable attention avant de déguster ce drink destiné à faire découvrir les subtilités du bourbon, par l’intermédiaire du Buffalo Trace, infusé au pop-corn. Un cordial de pop-corn, de la fleur d’oranger et du sésame entrent également dans la recette. Le cocktail, très onctueux, fait ressortir fortement les notes du wkisky, à l’opposé de sa couleur orangée. Pour la version sans alcool, l’American malt de Lyre’s, l’équivalent soft d’un whisky, est lui aussi infusé au pop-corn. En bouche, on retrouve l’esprit d’un old fashioned, de manière assez disruptive.

Des cocktails classiques revisités

Les “twists” proposés en fin de carte (quatre recettes) sont, eux, bien plus à-même de casser les codes des cocktails. “Nous souhaitions emmener les habitués des cocktails classiques vers des recettes plus originales, sans pour autant totalement les dépayser. Cela passe par des drinks clarifiés”, précisent les bartenders. Pina colada, mojito, pisco sour et bloody mary ont été entièrement revisités.

Ceci n'est pas un mojito - Drinks & Co - Nouvelle carte (mars 2022)

Ceci n’est pas un mojito

“Ceci n’est pas un mojito”, se nomme l’une des recettes – verre tumbler, aspect transparent et petite feuille : on confirme. Du rhum Plantation 3 stars (41,2%) est utilisé, tout comme l’overproof (63%) de Wray&Nephew, distillé avec de la menthe et du citron vert. Un cocktail très aromatique, donc, mais qui se distingue par son aspect proche d’une limonade, et ses notes d’agrumes. Quinze personnes se relaient derrière le bar, ouvert toute la journée du lundi au samedi.

Marie-Laure Berny-Tarente, directrice générale de Drinks & Co : “nos équipes se nourrissent des deux univers bar et retail”

De quelle manière a évolué l’offre en boutique depuis l’ouverture ?

Nous proposons 1300 références de vins et spiritueux en magasin, avec un gros focus sur les spiritueux, dont un large assortiment de gins. Il s’agissait d’un parti-pris au démarrage. Le gin est un produit qui s’adresse à une clientèle jeune, et nous avons aussi beaucoup de références no/low. Nous poussons le sans alcool, en consacrant 10% de notre assortiment, avec des produits raffinés, d’où le fait que nous n’utilisons pas le terme de “mocktails” au bar. De plus, nous disposons d’un espace de masterclasses en mode “speakeasy”,, avec des ateliers autour du vin et de la mixologie. Sur le vin, nous avons des clients qui viennent jusqu’à trois fois par mois. En cave, au démarrage, nous avons commencé avec de petites étiquettes de vins, et nous montons progressivement en gamme. Nous avons des bouteilles sous la barre des 10 euros.

Coupe de champagne Essentiel Piper Heidsieck - Drinks & Co

Pour le champagne Piper-Heidsieck Essentiel, l’équipe de Drinks & Co a travaillé avec le maître de caves pour se positionner entre le premier prix et les gammes supérieures, avec un produit vendu 36,90 euros la bouteille. Cet extra brut est aussi vendu à la coupe.

De quelle manière travaillent les équipes bar et retail ?

Nous avons des équipes très formées sur le vin (WSET), et des gens qui viennent de l’univers de la vente et du service clients. Auprès des équipes retail, nous effectuons une présentation des cocktails, tandis que nos barmans ont travaillé sur la partie cave durant la crise Covid. Les clients peuvent se projeter sur les deux parties. A partir du bar, on peut aussi comprendre les comportements des clients, tandis que dans la salle de masterclasses, il y a une carte confidentielle, parallèlement au bar principal (12 mètres de long, cinq stations). On peut sortir jusqu’à 200 cocktails par heure en afterwork, entre la terrasse et la salle. Les concours ont repris, et nos barmans ont commencé à y participer.

Quelles sont les orientations données au bar ?

Une deuxième version de la carte cocktails, autour des sept péchés capitaux, a été lancée le 24 mars. Nous avons adopté le même positionnement, avec le concours de nos barmans. La carte a beaucoup de personnalité. Nous avons toujours un cocktail sans alcool parmi nos plus gros volumes. Dans Paris, nous voulions être au plus près des clients, avec une clientèle d’afterwork en sortie de bureaux. Nous sommes pleins avant les autres, dès 18 heures, mais la soirée se termine assez tôt (nous fermons à minuit). Sur le food, nous avons une offre de restauration de 12 heures à 22 heures, et un brunch à partir de 15 heures le samedi. Nous proposons des plats autour des légumes. Le soir, nous proposons des tapas.

L’abus d’alcool est dangereux pour la santé. A consommer avec modération.

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A propos de l'auteur
Journaliste dans la presse professionnelle, j'édite Business & Marchés à titre personnel depuis 2007.
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