Les professionnels du champagne tentent de contre-carrer une crise liée à un recul des exportations et des stocks trop importants.
Jusqu’à moins 25%. Les réductions consenties par certaines maisons de champagne reflètent la crise traversée par un secteur peu habitué à de telles périodes de turbulences. En dépit d’une croissance toujours perceptible sur le long terme, avec 3% de hausse des ventes annuelle moyenne, les expéditions de champagne devraient chuter de 13% entre 2008 et 2009. La France n’est pas non plus épargnée, avec des prix cassés pour stimuler la consommation.
Les difficultés économiques n’ont pas épargné les ventes du précieux liquide, en recul jusqu’à 60% sur certains marchés étrangers. L’hémorragie est inquiétante: -31% au Royaume-Uni, -37% d’expéditions en Belgique entre janvier et août, -41% aux États-Unis, voire -57% en Italie.
La nécessité réside aujourd’hui dans l’écoulement des stocks plutôt que sur la création de valeur, et dans l’adaptation de l’offre à la demande avec des produits moins onéreux, quitte à en passer par des sous-marques. La vente de bouteilles à leur prix de revient, constatée dans une poignée de cas extrême, témoigne de la nécessité de liquidités ressentie dans le secteur. La pression sur la trésorerie oblige les maisons de champagne à faire des sacrifices, en s’adaptant à un contexte économique difficile.
Cette nouvelle posture est particulièrement visible si l’on en juge les références disponibles en rayon. Vranken fournit à Leclerc des bouteilles estampillées Germain, tandis que le fabricant des bouteilles Lanson propose également une marque plus accessible, Marquis de Vauzelle. Des noms moins prestigieux mais une origine qui le reste: les astuces des grands noms du champagne n’ont rien à envier à celles pratiquées dans de nombreux autres secteurs.
L’aspect industriel et financier reprend le dessus sur le caractère « haut de gamme » véhiculé par la profession. Taittinger ou Bollinger ont également recours à ce type de pratiques. Boizel Champagne Chanoine pourrait même réaliser 30% de ses ventes annuelles, pour l’année 2009, par ce biais.
Les rendements comme variable d’ajustement
Il reste, à l’heure actuelle, « des volumes à écouler alors que la demande dépendra de la vigueur de la reprise. Aujourd’hui, la logique est de baisser les rendements pour mettre sur le marché moins de volumes dans quinze mois », expliquait récemment au Journal des Finances Arnaud Guérin, analyste financier chez Portzamparc. Le Comité interprofessionnel des vins de Champagne (CIVC), qui rassemble les acteurs de la filière, devrait donc revoir à la baisse les objectifs de rendements par hectare, fixés avant le début des vendanges.
Il assurait dès juillet dernier, dans un communiqué, s’enquérir de la situation et œuvrer en faveur de solutions pour parer à la crise. « L’interprofession prépare des mesures d’ensemble inscrites dans un cadre pluriannuel destinées à préserver la qualité des vins […], à réguler le marché des raisins en ajustant le volume disponible en fonction de la demande des consommateurs et du niveau des stocks », indiquait alors le CIVC, comptant également prendre en compte les difficultés de trésorerie.
Dans l’attente d’un déblocage de la situation, les producteurs tablent sur un rebond des ventes consécutif au déstockage pratiqué, et sur l’eldorado que représentent les pays émergents. La crise actuelle provoque néanmoins une vague de remous chez les vignerons, dont les instances représentatives sont ébranlées.