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Comment Canal+ compte faire face à la télévision connectée

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Selon Bertrand Meheut, le géant de la télévision payante doit cultiver son originalité et se développer sur tous les supports pour contrer l’arrivée de nouveaux acteurs.

Et si le leadership de Canal+ dans la télévision payante était affecté par l’essor de la télévision connectée ? Le lien direct entre les postes de télévision et une connexion à Internet permet de contourner les producteurs de contenus qui doivent, selon Bertrand Meheut, président du groupe audiovisuel, se différencier et faire valoir leur valeur ajoutée pour conserver leurs positions.

Invité jeudi dernier du Club Entreprises La Tribune/CCIP, il a rappelé l’importance d’enjeux stratégiques toujours plus complexes pour Canal+, qu’il dirige depuis 2002. Il a redressé de manière inattendue  la chaîne cryptée, criblée de dettes et pourvue d’une audience et d’abonnements déclinants, et réussi à instaurer un cercle vertueux pour les souscriptions, alimenté par une politique forte d’acquisitions, de production et de fidélisation.

Si les chaînes tentent de reprendre la main sur le développement de la télévision connectée au moyen d’implications techniques, comme en témoignent l’élaboration de la norme HbbTV, ou par le biais de partenariats avec les constructeurs (TF1 avec Samsung ou M6 avec Sony, par exemple), il n’en demeure pas moins que leur rôle de fournisseur de contenus est attaqué par de nouveaux entrants, principalement des sociétés passant du Web au petit écran. Google a ainsi tenté d’imposer, à travers une autre technologie (un boîtier), GoogleTV, la transmission de contenus vidéo vers les téléviseurs. Les résultats n’ont pas été à la hauteur des espérances, mais la firme continue de travailler sur le sujet, notamment par le biais de YouTube.

Pour tenter d’émerger dans un paysage audiovisuel particulièrement fourni et amené à évoluer, Bertrand Meheut explique que « la clef, c’est une éditorialisation poussée de contenus uniques, et d’être présent sur toute la chronologie des médias ». Il rejoint ici les convictions de Rémi Pfimlin, président de France Télévisions, exprimées lors d’un colloque au CSA : « à nous d’incarner des marques fortes, susceptibles de jouer le rôle de tiers de confiance ». La chronologie des médias concerne l’échelonnement de la diffusion d’un même contenu sur plusieurs supports (cinéma, DVD, TV payante…), lui permettant d’être financé plusieurs fois, a-t-il rappelé, fort d’une position quasi-incontournable dans la filière cinématographique.

Diversification et différenciation

Ce cycle pourrait également prochainement se prolonger, pour Canal+, par une fenêtre de diffusion sur une chaîne gratuite, répondant au nom de code Canal 20. Actuellement présent sur la TNT gratuite avec i>Télé, le groupe compte mettre les bouchées doubles et injecter de 50 à 100 millions d’euros annuels dans une antenne dédiée aux CSP+, à l’instar de la chaîne d’information.

Ce positionnement spécifique n’entamera pas la puissance de TF1 ou de M6, aux cibles plus larges, a martelé Bertrand Meheut, qui compte convaincre les autorités d’autoriser, comme la loi le permet, le lancement des canaux compensatoires à ces trois groupes… sous la même norme technique. « Le groupe Canal a investi 500 millions d’euros dans l’arrêt de l’analogique », a-t-il souligné, ajoutant que les chaînes TNT ne dépassent pas les 3% de parts d’audience alors que TF1 atteint 25%.

Canal 20 constitue donc, selon Bertrand Meheut, un moyen supplémentaire de faire face à la télévision connectée, la consommation de ce médias s’accroissant chaque année en dépit de la multiplication des écrans. L’alimentation de cette chaîne en contenus passera notamment par le catalogue de la maison-mère, actuellement en pleine bataille pour les droits du championnat de France de football et en plein développement de son activité de production de fictions.

La « création originale », qui fait l’objet d’une forte exposition sur la chaîne cryptée, participe à la différenciation de l’antenne par rapport à ses concurrentes, et concourt, pour Bertrand Meheut, à la décision d’abonnement au même titre que les droits sportifs : l’ensemble de la famille doit pouvoir trouver, dans le bouquet de chaînes éditées, un programme adapté à ses attentes. Cette double stratégie de segmentation et de programmes fédérateurs est plus difficile à atteindre pour de nouveaux entrants en provenance de l’Internet.

Dans dix ans, le groupe Canal+ sera, selon les prévisions de son président, sur tous les fronts en matière technologique. D’ores et déjà, un nouveau démodulateur, baptisé Le Cube, permet de faire parvenir aux abonnés des contenus directement sur leur boîtier. Les applications iPhone et iPad sont sur les starting-blocks et la Xbox permet de recevoir la chaîne premium. Les diffuseurs semblent plus que jamais amenés, face à cette révolution annoncée, à remplir leur rôle, en l’étendant de manière résolue à la distribution de leurs contenus, si possible originaux.

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Journaliste dans la presse professionnelle, j'édite Business & Marchés à titre personnel depuis 2007.
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