La compagnie pétrolière doit affronter les conséquences économiques causées par le naufrage d’une plateforme offshore et la pollution au large du continent américain.
L’évaluation du seul coût du nettoyage des côtes – avant même que le pétrole ait touché ces dernières – était compris fin avril, selon l’agence de notation Fitch Ratings, entre 2,5 et 3 milliards de dollars. Le naufrage d’une plateforme pétrolière le 20 avril dernier au large des côtes du Mexique a obligé BP (British Petroleum), l’exploitant de l’installation offshore, à mettre en place un plan d’action d’une ampleur inédite. La solution censée empêcher l’extension de la nappe, une cloche d’acier et de béton, n’a pas porté ses fruits.
Depuis le début de la catastrophe, on estime que 795.000 litres de pétrole sont déversés quotidiennement dans l’océan, amputant de 25 milliards de dollars la valeur du stock de BP. Au-delà des conséquences en matière de production, la compagnie pétrolière devra faire face aux coûts engendrés par le nettoyage des côtes et les potentielles sanctions infligées ultérieurement.
« L’assurance devrait probablement couvrir la majorité de ces coûts, limitant les dépenses de trésorerie et la pression potentielle sur la notation de BP », a expliqué Fitch Ratings dans un communiqué rapidement complété par des estimations chiffrées : deux réassureurs évaluent à plus de 1,5 milliard de dollars la somme à la charge des assureurs, la filiale dédiée de BP, Jupiter, étant en première ligne. A l’instar de nombreuses entreprises du secteur, BP dispose de sa propre compagnie d’assurances.
Lors de précédents cas de marées noires, essentiellement causés par des navires, les Fipol (Fonds internationaux d’indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures) ont joué un rôle dans l’allocation des sommes nécessaires. Parmi les exemples les plus récents, en 2006, le naufrage du Prestige au large du Portugal – 77.000 tonnes de pétrole engendrant une pollution évaluée à 1 milliard d’euros – constitue un des cas les plus représentatifs, l’assureur du navire ayant également contribué.
Au-delà du nettoyage, les indemnisations
En mars 1989, le naufrage de l’Exxon Valdez au large de l’Alaska (42.000 tonnes de pétrole brut déversées dans l’océan Arctique, 800km de côtes touchées, 250.000 oiseaux marins morts) s’était soldé, pour Exxon, par un montant total de 3,4 milliards de dollars pour le nettoyage des côtes et de la faune, ainsi que pour le dédommagement des pêcheurs. 500 millions de dollars de dommages ont dû être versés, sur décision de justice, aux habitants de la région (5 milliards initialement).
L’état de catastrophe naturelle a été décrété en Louisiane, où 6.000 membres de la Garde nationale ont été mobilisés pour participer aux opérations de nettoyage. Un coût supporté par l’Etat fédéral mais qui devrait par la suite incomber à British Petroleum, qui s’est engagé à assumer financièrement cette tâche (25 milliards ont déjà été versés aux Etats concernés).
L’Oil Pollution Act, adopté outre-Atlantique en 1990, oblige les compagnies pétrolières à prendre en charge les coûts engendrés par une marée noire. Un projet de loi, déposé par des sénateurs en début de semaine, propose de faire passer de 75 millions à 10 milliards de dollars le plafond des indemnisations relatives aux conséquences économiques de telles catastrophes.
« Les Etats-Unis vont donner un tour de vis en matière de sécurité à toute l’industrie pétrolière travaillant offshore. Barack Obama pourrait également reconsidérer son plan de reprise des forages offshore », met en garde Francis Perrin, directeur de la revue Pétrole et gaz arabes, dans un entretien accordé à RFI. Un plan étendant les forages en mer, notamment au large de la Virginie, avait été annoncé le 31 mars dernier mais les autorisations sont désormais conditionnées à l’instauration de nouvelles mesures de sécurité. Depuis 2006, plus de 500 incendies se sont déclarées dans les plateformes du golfe du Mexique. Un des écosystèmes les plus développés est menacé, affectant notamment deux réserves naturelles.
Parallèlement à cette situation, la tension exercée sur l’offre et les incertitudes sur les coûts de production poussent depuis plusieurs jours les cours du pétrole à la hausse.