Le traitement des données personnelles culturelles, nouvel or noir du secteur, fait débat.
L’essor de la consommation numérique de biens et services culturels induit une évolution de l’équipement des ménages, et un accroissement du nombre de données communiquées aux opérateurs des différentes plateformes ainsi qu’aux créateurs de contenus. Les smartphones et tablettes « évoquent surtout la fin de la consommation par foyers au profit d’usages personnels et de contenus recommandés par des communautés en ligne plutôt que par le cercle familial immédiat », explique Bain & Company dans une étude présentée au Forum d’Avignon.
Dans une enquête menée dans huit pays, les consommateurs interrogés se montrent toutefois réticents à l’utilisation de leurs données personnelles à des fins de recommandation personnalisée de contenus. En France et en Allemagne, 68 % des utilisateurs de vidéo en ligne et 73 % des auditeurs de musique y sont opposés. La demande de consentement des utilisateurs pour l’utilisation de leurs données apparaît donc comme un moyen de limiter les craintes propres à ce système, et sont davantage en phase avec l’évolution de la réglementation.
Dans le cas de recommandations sur les plateformes digitales, les consommateurs sondés plébiscitent l’avis des autres internautes. Suivent ensuite les « coups de cœur » des sites Internet et, enfin, de recommandations personnalisées. Par l’amplitude de leur couverture, iTunes, Android Market ou la plateforme de téléchargement d’Amazon permettent d’influencer le choix des consommateurs. Les réseaux sociaux jouent également un rôle-clef en matière de recommandations.
La difficile conciliation entre vie privée et modèles économiques
Ce difficile équilibre entre protection de la vie privée et prise en compte, par les entreprises, des possibilités offertes par la masse de données collectées auprès des internautes est également au cœur de la contribution d’EY. « Alors qu’Internet peut apparaître comme un lieu de normalisation et de surveillance, se pose avec acuité la question du pouvoir de contrôle que permet la connaissance intime des comportements et des données personnelles culturels », indique Bruno Perrin, associé responsable du secteur Technologies Médias Télécoms en France.
L’exploitation des « traces » numériques laissées par les utilisateurs peuvent certes leur faciliter leur parcours d’achat, par exemple en disposant de formulaires préremplis ou de propositions adaptées à leur situation, mais présente un risque de rejet de la part des consommateurs. Les données personnelles culturelles présentent pourtant un profil exceptionnel pour les acteurs du marketing : multiplicité des sources, volumétrie… « Les comportements culturels, davantage que les traditionnels CSP, apportent de la valeur aux profils numériques », résume EY.
Dans ce contexte, les champions du numérique tels qu’Amazon ou Google jouent de nouveau un rôle-clef à travers leurs infrastructures de stockage de données. Les services permettant aux organisations d’organiser et de dégager des tendances à partir des données collectées ont également une carte à jouer, avec pour clients les producteurs (musées, bibliothèques…) et les utilisateurs (médias, sociétés de marketing…) de données personnelles culturelles. Cette nouvelle chaîne de valeur, qui sera au cœur de l’avenir du secteur de la culture, n’attend qu’à être consolidée, avec une réduction des incertitudes liées au traitement des données personnelles.