Le rebond de la croissance américaine reste fragile. Les prix du pétrole et les difficultés d’établissements bancaires masquent l’éclatante santé du commerce extérieur. L’action de la Fed et de l’Administration Bush semble plus que jamais d’actualité.
Finalement, les Etats-Unis ne sont pas (encore) entrés en récession. Suite à une première estimation, la croissance américaine a finalement atteint 1,9 % au second trimestre en rythme annuel, après un accroissement du PIB de 0,9 % au cours du premier trimestre. Touchés de plein fouet par les dérives liées aux subprimes, les Américains, empêtrés pour certains d’entre eux dans des défauts de remboursement et des saisies immobilières, ont dû aussi faire face aux restrictions des conditions d’octroi de crédit, à la hausse du chômage et, facteur exogène à cette crise, à la hausse des prix du pétrole et, de fait, des carburants. Au dernier trimestre de 2007, ces éléments ont affecté la croissance, alors en recul de 0,2 %.
Le taux de chômage atteint désormais 5,7 % outre-Atlantique, un chiffre qui s’est brutalement aggravé par la perte de 51.000 emplois en juillet. Selon certains économistes, la barre des 6 % pourrait rapidement être atteinte. L’emploi fait office de variable d’ajustement pour des entreprises pénalisées par la hausse des matières premières. Les réductions massives d’effectifs dans la finance ont aussi influé sur ce taux. Le candidat démocrate à la Maison-Blanche Barack Obama a présenté la semaine dernière un plan de relance axé sur le soutien à la population active et qui pourrait être mis en place dès janvier s’il parvenait à être élu. Dans ses Perspectives rendues publiques fin juin, l’OCDE tablait sur un taux de chômage à 5,4 % en 2008 et à 6,1 % pour 2009.
Le plan de relance budgétaire d’un montant de 91 milliards de dollars voté en début d’année afin de relancer la consommation des ménages commence tout juste à porter ses fruits. La consommation a progressé de 1,5 % en rythme annuel. Les chèques adressés aux ménages ont notamment été réinvestis chez Wal-Mart, qui bénéficie de sa politique de prix bas (« Low prices, every day », littéralement « Des prix bas, tous les jours »). Aux Etats-Unis, le premier distributeur américain et mondial a vu ses ventes progresser de 5,4 % en juin.
La politique amorcée en début de crise montre ses premiers effets
« L’activisme des autorités américaines s’est exercé tous azimuts ces derniers mois. De l’abaissement des taux directeurs à l’injection de liquidités, du sauvetage de banques d’investissement orchestré par la Réserve fédérale à l’institution d’un plan de relance, tout est mis en oeuvre pour stabiliser le système bancaire et éviter la récession », soulignaient en février dernier les économistes de l’OFCE dans leurs Perspectives économiques mondiales. L’inflation menace ce château de cartes, mais pas de quoi s’affoler comparé à la situation européenne : selon le Fonds monétaire international, elle ne s’élèvera qu’à 3 % cette année. La politique de baisse massive des taux pratiquée par la Fed a donc eu, pour le moment, des conséquences limitées en termes d’inflation, loin de la spirale redoutée par les cassandres. La méfiance se porte davantage aujourd’hui sur les risques de stagflation, ce détonant mélange de hausse des prix et de croissance stagnante.
Le secteur immobilier est au centre des attentions. Dans certaines villes, l’activité redémarre, lentement mais sûrement : dans la ville californienne de Stockton, la plus sévèrement affectée par les saisies immobilières, les ventes de maisons ont doublé au second trimestre, rapporte Le Figaro. Les agents immobiliers se frottent les mains, mais avec moins d’enthousiasme qu’avant la crise : les prix y ont reculé en moyenne de 37 % par rapport au record établi fin 2006. L’indice des prix de l’immobilier dans vingt grandes villes américaines est passé d’une base 100 en juin 2007 à 85 en avril dernier. « Le plan de relance de Fannie Mae et de Freddie Mac qui vient d’être avalisé par la Maison-Blanche, tout comme l’aide directe en faveur des propriétaires incapables de rembourser leurs dettes, va-t-il permettre d’enrayer la chute des prix de l’immobilier ? », s’interroge dans Le Figaro l’économiste à BNP Paribas Eric Vergnaud.
Dans ce contexte morose pour les ménages, les Etats-Unis peuvent néanmoins compter sur le commerce extérieur pour se refaire une santé. Dopées par la faiblesse du dollar, les exportations ont grimpé de 9,2 % au second trimestre. Les importations ont quant à elles reculé de 6,6 %. Ces chiffres confortent les choix du président de la Réserve fédérale Ben Bernanke, qui a, avec l’appui de ses équipes, procédé à une baisse des taux d’intérêt de 5,25 % à 2 % depuis l’été 2007, date à laquelle la crise immobilière puis financière a provoqué ses premiers dégâts.
Selon un modèle construit par les analystes de la Société générale en début d’année, un potentiel ralentissement américain affecterait en premier lieu les partenaires de l’Alena, l’alliance commerciale à laquelle participent aussi le Canada et le Mexique, puis, dans un second temps, les pays dont l’économie dépend fortement des exportations. Mais d’autres canaux peuvent affecter plus rapidement d’autres Etats, tels les marchés financiers, en proie à d’importantes incertitudes autour de la santé du secteur bancaire. Les établissements de crédit, à l’origine de la crise des subprimes, n’ont pas fini de faire parler d’eux.