Nespresso doit autant son succès à ses propres équipes qu’à la nécessité d’en faire une activité à part entière.
Les débuts de Nespresso (1/2). L’autonomisation de Nespresso a joué un rôle majeur dans la réussite de la stratégie suivie, l’enjeu étant pour ses concepteurs de s’affranchir des codes « grand public » appliqués par Nestlé afin de monter en gamme. L’extension du champ d’action de ce groupe à la création d’appareils d’électroménager et à la distribution ne pouvait pas s’effectuer dans le cadre des structures courantes de l’entreprise, et a donc nécessité la création d’un univers complet de services.
Le lancement, en 1986, de Nespresso a constitué l’aboutissement d’un processus de plus de dix ans de recherche et développement. Selon la firme, cette mise sur le marché ne constituait pas une évidence : les propositions du département R&D n’ont initialement guère convaincu Nestlé, qui a in fine modifié sa perception sur ce travail à partir de l’opinion émise en 1984 par le directeur Asie, séduit par ce concept de café en portions lui ayant été proposé au Japon par Eric Favre, à la faveur d’un déplacement professionnel : la possibilité d’adaptation d’un tel produit au marché japonais a agi comme l’élément déclencheur. De plus, en Italie, pays frontalier de la Suisse, l’expresso s’arroge 50% de parts de marché.
La qualité professionnelle à domicile
Ce dernier, diplômé de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne, a commencé à travailler sur le concept de Nespresso en 1974, sur la base d’une idée personnelle selon ses propres propos. « L’idée vient alors que l’on s’y attend le moins », expliquait-il en 2007 à la revue suisse Inventeurs. Simplifier la préparation du café, en préserver les qualités et proposer un produit à usage domestique, respectant le rendu offert par des machines professionnelles, tels étaient les objectifs que s’était fixé Eric Favre, alors ingénieur packaging, lors de la proposition du projet à son employeur d’alors, Nestlé.
L’idée de pouvoir décliner dans les foyers la possibilité de réaliser un véritable expresso nécessitait, ce qui fût fait, une extension des compétences « historiques » de Nestlé, le café lui-même ne constituant qu’un élément de la batterie d’éléments à créer et à déployer, au premier rang desquels les machines. Nestlé a financé durant une douzaine d’années les travaux initiaux de son département R&D, lequel a donc axé sa démarche sur l’objectif de parvenir à un système, d’un gabarit acceptable à domicile, pouvant alimenter, à partir d’un contenant individuel, une tasse de café. Eric Favre, à l’origine de la fameuse capsule, dans sa première version, a perdu les droits intellectuels de son invention, le brevet ayant été déposé par Nestlé.
Le secteur du café n’était pas inconnu de la société : la gamme Nescafé, proposant du café soluble, a été créée en 1938. Celle-ci s’est essentiellement popularisée sur la base de ses dosettes individuelles, facilement transportables, et est déclinée sous divers formats. Le mode de fabrication a évolué en 1967, tandis que le cappucino et l’expresso ont fait leur apparition en 1990. Cette identité est également utilisée à destination des professionnels, dont l’observation a constitué le point de départ de l’aventure de Nespresso. Le mélange de café et de chicorée Ricoré figurait alors également, et l’est toujours, parmi les succès du groupe.
- Prochain volet : le difficile succès d’une innovation
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