La reprise économique conduit les acheteurs à rechercher des possibilités de croissance externe, dans un contexte toutefois encore difficile. Les conditions des deals témoignent de l’incertitude ambiante.
Négociations tendues autour du prix d’achat en fonction des performances futures des nouveaux ensembles, rééquilibrage des risques et clauses moins contraignantes : les tendances du marché des fusions-acquisitions dévoilées par le cabinet CMS Bureau Francis Lefebvre font état de transactions plus apaisées et plus régulières. Conduite en 2010, l’étude témoigne d’un accroissement du nombre de transactions, appuyé par un cadre plus favorable.
Toutefois, la vigilance ne se relâche pas. Sur le marché français, de nombreuses conditions suspensives émaillent toutefois les contrats, pas toujours comprises par les acteurs étrangers. L’environnement actuel ne favorise pas un déroulement « classique » des opérations, selon Jacques Isnard, avocat associé : « les investisseurs sont prêts à investir mais l’environnement économique ne favorise pas la confiance », explique-t-il. En Europe, les pratiques divergent : on assiste à un raccourcissement des délais de garantie au Royaume-Uni, tandis qu’ils s’allongent au Benelux.
Le cabinet d’audit PricewaterhouseCoopers constate également une amélioration – contrariée – du marché des M&A, en s’appuyant sur le secteur automobile, au cœur de la tourmente ces dernières années. Une sensibilité accrue au risque ainsi qu’un accès limité aux sources de financement ont contraint les acheteurs à se concentrer sur des opérations de faible envergure par rapport aux transactions passées, mais ont permis de cibler un objectif résolument stratégique pour les sociétés.
Les firmes automobiles se concentrent désormais sur « des opérations stratégiques visant à élargir leur couverture géographique et/ou renforcer leur portefeuille technologique, et à renforcer leur capacité à affronter la concurrence mondiale », indique Philippe Couderc, spécialiste des M&A automobiles du cabinet. Le marché des BRIC constitue ainsi un enjeu majeur pour les constructeurs et les équipementiers, qui comptent se renforcer en priorité dans les pays émergents. Faute de pouvoir se développer davantage sur leur marché domestique, ils visent des zones au sein desquelles les réserves de croissance sont les plus fortes.
Dans le secteur du luxe, sur lequel les valorisations sont traditionnellement élevées, la reprise économique a précipité les transactions, avec la volonté, pour de nombreux acteurs, de ne pas manquer de potentielles proies. Les restructurations effectuées durant la crise ainsi que l’amélioration des ventes offrent aux acheteurs de nombreuses possibilités d’investissement, avec pour ligne de mire de forts niveaux de rentabilité. De grands groupes comptent mener à bien leurs projets dans des délais bien plus courts que ceux initialement escomptés afin de se renforcer au plus vite.
Les PME également concernées
Cette recherche de compétitivité vaut également à l’échelle locale, comme le prouve l’actualité en régions. Des centaines de PME-PMI ont ainsi opéré un processus de regroupement ou de redéfinition de leur périmètre d’activité, poussées par la crise sans précédent qu’elles viennent de vivre ou des exigences règlementaires.
Des précautions sont toutefois à prendre : il apparaît difficile, selon Thierry Lavergne, directeur du cabinet spécialisé Actifrance, de compenser un déficit de croissance organique par des opérations de croissance externe. « Racheter une entreprise n’est pas neutre. Il faut avoir une base solide et être capable de faire évoluer son organisation pour absorber la future structure. C’est tout sauf une bonne solution pour une société qui a des difficultés », rappelle au Journal des entreprises Thierry Lavergne, directeur du cabinet spécialisé Actifrance. Pour de nombreux experts, sans être catégoriques, une réorganisation interne ou une intensification de la politique de recherche et développement peuvent donc constituer un préalable à toute opération.
Qu’elles soient effectuées dans un objectif d’acquisition, de consolidation ou de diversification, les opérations de M&A restent cependant risquées. Les exemples de divergences stratégiques, d’intégrations difficiles ou de synergies délicates à concrétiser sont nombreux. Une composante avec laquelle tous les acteurs doivent opérer.
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