De nouveaux investissements à la distillerie de Rozelieures (Meurthe-et-Moselle), pour amplifier la production de whisky. Une attention particulière est toujours portée aux céréales.
REPORTAGE – En Meurthe-et-Moselle, les vastes espaces agricoles qui entourent le village de Rozelieures (186 habitants) peinent à laisser croire, au premier abord, que l’un des pionniers du whisky français s’y développe lentement, mais sûrement.
Un nouveau chai, tout de pierre vêtu, trône à l’orée de la ferme-distillerie de Rozelieures, qui s’est également enrichi de deux nouveaux alambics. Objectif : faire passer la capacité de la distillerie de 220 000 litres à 550 000 litres d’alcool pur et pouvoir stocker 2000 fûts supplémentaires. 5 millions d’euros ont été nécessaires, hors tonneaux, malt, immobilisation du stock supplémentaire et personnel (8 millions d’euros).
De nouvelles capacités de production
Les Grallet-Dupic distillent sur place depuis 1890. Les deux premiers alambics actuellement employés pour produire leurs whiskies, commercialisés sous la marque Rozelieures, jaugeaient 32 et 16 hectolitres de capacité de charge; les deux nouveaux sont à 52hl et à 25hl. L’occasion, pour l’entreprise (15 personnes), d’affirmer son tropisme environnemental. “Nous triplons la capacité de production sans consommer plus d’eau en théorie”, souligne Christophe Dupic, propriétaire. Au fil des différentes étapes de production, de l’eau est récupérée. Une usine de méthanisation est par ailleurs installée dans le village depuis 2014, en partenariat avec deux éleveurs, permettant à la distillerie d’être autonome en énergie à hauteur de 80%.
Dans le nouveau chai, les rimes sont courtes, pour pouvoir faire rouler les fûts plus rapidement et accéder plus aisément aux stocks. “Je voulais pouvoir tout déguster”, illustre Christophe Dupic, qui a décliné l’idée d’un stockage vertical qui aurait pourtant plus permettre d’accueillir plus de fûts. Le chai, humide, est semi-enterré. En bout de chaîne, la réduction, pour la mise au degré, est semi-automatisée. Au total, l’entreprise compte cinq chais dans la région, ainsi qu’un chai situé à Cognac (Charente).
La brasserie, où sont produits 10 000 litres de moût fermenté par jour, a quant à elle été réaménagée et équipée ces dernières années.
Au printemps, de nouveaux produits
Ces nouveautés permettent de développer la gamme de whiskies Rozelieures, avec pour objectif d’aller plus loin dans les comptes d’âge. Pour l’heure, en février dernier, une gamme nommée Sigma, composée d’un whisky et d’un new make, a été lancée à destination des bartenders.
Les amateurs de rhum seront quant à eux ravis : après deux ans d’absence, depuis le mois d’avril 2024, il est possible de se procurer une bouteille de single cask HSE. Cette année, 20 fûts seront envoyés en Martinique, et inversement. Tous les six mois, des whiskies vieillis dans différents fûts sont par ailleurs lancés depuis septembre 2022. Depuis le printemps, un 10 ans, vieilli en fût de Sauternes, aux notes de cuir au nez, boisées en bouche et fruitées en finale, est ainsi disponible. La distillerie met également le paquet sur ses whiskies dont l’orge est issue d’une seule et même parcelle – dans la gamme, coup de cœur pour Le Tertre 40 pieds, rond en bouche et résolument céréalier.
A propos de céréales, l’entreprise possède 300 hectares de grandes cultures, dont 55 ha en bio. “Il y a encore des impasses techniques sur le désherbage, et la perte de productivité à l’hectare n’est pas encore compensée. Il faut utiliser des variétés plus résistantes, mais dont le rendu gustatif est différent, comme Explorer, au goût plus fruité, tandis que Laureat et Prospect, que nous utilisons en conventionnel, apportent un goût plus pâtissier”, commente Christophe Dupic, à travers champs. Un whisky bio, Organic, est produit à Rozelieures.
Une nouvelle gamme autour de la mirabelle
Dans la région, impossible de passer à côté de la culture de la mirabelle – 35 hectares de vergers doivent être récoltés cet été. 1 ha de poires Williams, transformées en eaux-de-vie, et une parcelle de seigle figurent aussi parmi les actifs. “Avec le changement climatique, il a fallu avancer les dates de récolte, mais nous avons toujours eu des étés secs et chauds”, poursuit Christophe Dupic.
Pour répondre à une demande de son distributeur Dugas, l’activité regroupée sous le nom de Maison de la mirabelle vient de lancer une marque unique, Bellamira, avec un gin, une vodka, un amer et un pastis, des produits déjà connus des cavistes lorrains.
Dans les Vosges, à Lépanges-sur-Vologne, la distillerie est aussi actionnaire de la Malterie des Hautes-Vosges, ouverte en 2016 dans les locaux d’une ancienne filature et dont la production de 1200 tonnes annuelles est amenée à progresser. Les deux-tiers de la production partiront pour les besoins de la distillerie, compte tenu de la hausse de capacité, contre la moitié auparavant. Autant d’actualités que suit de près Maxime Dupic, l’un des trois fils du couple, qui a pris 10% du capital de l’entreprise familiale.
L’abus d’alcool est dangereux pour la santé. A consommer avec modération.