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La pénurie de matières premières comme détonateur d'une crise mondiale

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C’est un défi majeur qui s’annonce pour les organisations internationales. L’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) vient de dresser une liste des Etats affectés par des pénuries alimentaires, au premier rang desquels des pays africains. L’éclairage a beau avoir été mis sur l’importance de l’aide au développement de ces pays et au concours d’Etats tels que la Chine, qui compte y trouver un relais de croissance, force est de constater qu’ils subissent les conséquences d’une demande qui dépasse les estimations et de l’inflation des matières premières agricoles, portées par un mouvement de spéculation consécutif aux dégâts causés par la crise financière. La baisse du dollar en est le premier incriminé.

« Ce n’est pas seulement une pénurie mondiale, il y a tout un ensemble d’autres facteurs au niveau de la demande, pas seulement de l’offre. Il y a la demande de la Chine ou de l’Inde, deux pays avec une population de 2,2 milliards de personnes et depuis plusieurs années un taux de croissance de leur PIB entre 8 et 10 %. Ce qui se traduit par une augmentation des revenus de la population. Or, dans les pays du tiers-monde comme l’Inde, 50 à 60 % du revenu vont vers l’alimentation, contrairement aux pays développés, avec 10 à 20 %. Il y a aussi la demande d’aliments allant vers les bioénergies, expliquait récemment au Monde.fr le président de la FAO Jacques Diouf.

La production de céréales est incriminée dans le cadre de cette pénurie, mais pas dans la mesure où la demande aurait dépassé la production. En effet, cette dernière a augmenté en 2007 et devrait encore croître de 2,6% cette année selon la FAO, mais la hausse de la demande s’est avérée plus importante que prévue. A leur plus bas niveau depuis vingt-cinq ans, les stocks de céréales ne peuvent facilement se reconstituer. Les habitudes de consommation de pays fortement peuplés tels que l’Inde ou la Chine tendent à se rapprocher des procédés occidentaux, s’orientant vers des cultures animales, qui requièrent dix fois plus de terres que pour la production d’origine végétale. De ce fait, la part consacrée à cette dernière ne cesse de diminuer et les terres cultivables mondiales sont à 64% destinées à l’alimentation du bétail.

Autre facteur en cause dans cette pénurie: la part grandissante des terres consacrées à la production d’énergie, dont les fameux agrocarburants. Même les pays victimes de crises alimentaires s’y mettent, tels les Philippines qui se sont fixées pour objectif de parvenir à l’incorporation de 5% d’éthanol à l’essence classique d’ici 2012. Cet élément est également cité dans le cadre de la flambée des cours de ces mêmes matières premières agricoles. Le développement des usages non-alimentaires des céréales se répercute sur les cours, dans un contexte favorable aux carburants végétaux: selon l’institut Global Insight, le diester et le bioéthanol représenteront 15% de la demande mondiale de carburant d’ici à 2030. Le bioéthanol fait partie de ces énergies vertes. Des cultures de plantes céréalières et sucrières sont fermentées et transformées en sucre, puis en alcool. Un mélange à des produits pétroliers est effectué, puis est incorporé à l’essence, les véhicules équipés Flex Fuel étant le mieux placés pour en profiter.

Face à cette crise, plusieurs solutions sont envisageables, mais difficilement applicables du fait de la réticence de certains gouvernements locaux à accepter l’ingérence d’organismes internationaux. Afin de conserver leur pleine indépendance, des mesures à effet rapide tel que la baisse des taxes, l’incitation à la production locale afin de réduire les coûts de transport, la définition des usages de chaque parcelle de terre et l’instauration d’une réflexion sur de nouvelles technologies sont autant de mesures certes difficiles à prendre compte tenu des contraintes économiques et techniques, mais nécessaires afin de pouvoir temporairement calmer famines et émeutes qui courent à travers ces pays en voie de développement. Et, comme pour nous rappeler que la crise ne frappe pas que les autres, deux Etats européens sont mentionnés dans la liste de la FAO, la Moldavie et la Thetchénie (Russie).

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