Objectif affiché pour Frog: “l’excellence opérationnelle” dans ses process, afin de satisfaire ses clients. Un leitmotiv rappelé dans les dix pubs de l’enseigne (8 à Paris, 1 à Bordeaux, 1 à Toulouse), actuellement en redressement judiciaire. L’activité continue néanmoins, avec un focus sur le recrutement des managers, ainsi qu’un nouveau programme de nouvelles bières (Frog House Specials) destinées à chaque établissement. Paul Chantler, PDG, fait le point sur la situation de l’entreprise.
Quelle est la situation financière actuelle de l’entreprise ?
Paul Chantler – Nous avons ouvert une procédure de redressement judiciaire. Il s’agit d’un reliquat du Covid, avec une perte de 20 millions d’euros de chiffre d’affaires sur les deux dernières années (2020, 2021), alors que nous aurions dû faire 40 millions d’euros de chiffre d’affaires sur la période. Cela n’a pas été compensé par l’Etat (600 000 euros de fonds de solidarité), et les banques ne nous ont pas accompagné. Il s’agit d’un problème de financement, pas opérationnel. L’activité continue normalement.
De quelle manière reprend la fréquentation ?
Sur les mois de mars et d’avril, nous sommes en avance par rapport à la même période en 2019. Ceci étant, nous sommes très affectés par le télétravail (notamment à Bercy dans le 12ème arrondissement de Paris, Bibliothèque dans le 13ème arrondissement et XVI dans le 16ème arrondissement), et a contrario d’autres sites bénéficient d’une clientèle qui sort davantage, avec plus d’habitants à proximité (Révolution dans le 4ème arrondissement, Rosbif dans le 2ème arrondissement). La partie événementielle avec les entreprises, qui est un élément significatif pour notre activité, reprend bien depuis deux mois. Et les touristes reviennent enfin à Paris.
Commencez-vous à ressentir les effets de l’inflation ?
Les prix augmentent notamment sur le transport. Les steaks hachés ont augmenté de 40% par rapport à la période pré-Covid, l’huile de tournesol est trois fois plus chère qu’il y a trois mois. Les fournisseurs ne bloquent plus leurs tarifs sur une période donnée, ce qui nous permet peu de visibilité. On pourrait facilement perdre 5 points de marge sur l’année à venir. Je n’ai jamais connu une telle inflation en trente ans. Cela va être un choc.
Envisagez-vous de revoir les prix de vos produits ?
Cette situation détruit la rentabilité dans un environnement au sein duquel on ne peut que difficilement augmenter les prix car nos clients subissent aussi l’augmentation généralisée des coûts, et ont probablement moins d’argent disponible. Il faut gagner des parts de marché en construisant une offre attractive pour les clients, mais que l’on peut financer. Opérationnellement, il faut être excellent. Nous lançons une nouvelle offre de fidélité, qui nous permettra d’être au plus près des besoins de nos clients. Ensuite, on revoit la carte pour optimiser notre efficacité et trouver les meilleurs rapports qualité-prix pour chaque produit.
Quelles autres nouveautés sont en cours de lancement ?
Nous sommes très optimistes pour l’avenir. Notre programme de nouvelles bières va durer toute l’année. Depuis des années, l’un des nerfs de la guerre a été la constance en termes de qualité avec sept unités de production différentes pour la bière. On maîtrise cela assez bien maintenant, et le défi de cette année est de maintenir cette qualité tout en créant une bonne trentaine de nouvelles recettes. Par exemple, pour la Saint-Patrick, nous avons créé une bière rousse irlandaise. On travaille de plus en plus la saisonnalité, avec en ce moment une Pale Ale à la rhubarbe et une Saison à la betterave – les deux utilisant les premières récoltes de cette année. On constate un vrai enthousiasme parmi nos clients pour notre série « Hop Juice », une série de bières conçue autour des houblons fruités et douces.