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“Des bières simples peuvent avoir du goût”, rappelle Thomas Deck

3 min de lecture
Deck & Donohue - Bières fines- Pilsner et IPA

La brasserie francilienne Deck & Donohue trace son sillon avec une gamme stable de bières permanentes, un programme de vieillissement en barriques et des références saisonnières. Elle rappelle l’enjeu de réconcilier la bière et la gastronomie.

En 2014, Deck & Donohue lançait sur le marché ses premières bières depuis son atelier de Montreuil (Seine-Saint-Denis), avant d’emménager fin 2016 dans une brasserie de 1200 mètres carrés à Bonneuil-sur-Marne. L’entreprise a réalisé 1,6 million de chiffre d’affaires en 2020, un chiffre stable, notamment grâce à un référencement national chez Monoprix. Thomas Deck, qui dirige la brasserie (12 personnes, 4500 hl l’an dernier), revient pour Business & Marchés sur la manière dont la gamme a évolué. L’enjeu des acteurs du secteur étant de parvenir à stabiliser leur offre permanente et à innover.

Comment définissez-vous votre offre aujourd’hui ?

Nous avons cinq bières permanentes, une bière de saison (chaque trimestre), cinq bières spéciales par an, et quatre à cinq bières spéciales par an. Nos recettes permanentes doivent être stables, et doivent permettre aux consommateurs de s’y retrouver. Nous brassons aussi une bière pour les bars à cocktails de Quixotic Projets. Nous essayons de rester à l’écart de la course à la dernière nouveauté à la mode. Nous souhaitons réunir des gens curieux autour du goût et à l’importance des lieux, sans être élitistes. Nous voulons expliquer notre travail et prendre le temps de le faire. Les bières éphémères permettent quant à elles de stimuler notre créativité.

Quels défis techniques avez-vous dû relever avec les bières vieillies en barrique ?

Nous avons commencé les vieillissements en 2018, pour de premiers lancements en 2019. Cela fait évoluer le profil de la bière. Nous travaillons essentiellement avec des barriques de vignerons. Cela n’a pas un impact fort sur le degré d’alcool (contrairement aux barriques de bourbon, par exemple). Le bois amène une structure tannique. Des notes vineuses peuvent apparaître. Cela permet aussi de faire des assemblages. Dans notre métier de brasseur, on cherche à contrôler une recette et le processus. En barriques, nous devons laisser faire davantage la nature. C’est très empirique. Il faut accepter l’échec aussi. Régulièrement, nous devons jeter des produits. Il peut y avoir des problèmes de qualité, ou alors il n’y a pas de défauts mais le goût n’est pas satisfaisant.

Est-ce un moyen d’amener plus facilement la bière à table ?

Cela permet aussi de faire des macérations de fruits (merises, prunes avec un seul arbre, feuilles de cassis, mûres…) C’est une vraie occasion d’expérimenter. Nous sommes une brasserie très intéressée par l’univers du goût. Des cavistes et des restaurants revendent ces bières, par exemple en accords mets & bières avec des fromages à la Tour d’Argent. C’est très gratifiant ! Les brasseurs sont curieux de l’univers du goût, et inversement. Ces bières ont un vrai potentiel gastronomique.

“La craft ne doit pas se cantonner à des bières exubérantes”

Vous avez lancé une pilsner. Peut-on rappeler les enjeux de fabrication de ce style ?

La D Pilsner est claire et dorée, avec des houblons alsaciens qui donnent une légère amertume avec un côté herbacé. Nous l’avons sorti en bouteille début 2020, après un passage à la pression en 2019. La pilsner est une bière de fermentation basse. Elles nécessitent une phase de garde prolongée (de cinq à semaines en cuves, alors qu’une bière de fermentation haute va être prête en deux à trois semaines). Une brasserie qui ne ferait que des lagers aurait une capacité de production réduite. Le moindre défaut de fabrication ou de fermentation ressort instantanément. C’est une bière très frêle, très discrète. Elle boucle la boucle de la bière : des bières très simples peuvent avoir du goût. La bière artisanale ne doit pas se limiter à des bières très exubérantes.

Comment se poursuit votre programme de bières de saison ?

Nous relancerons la Beaupré, début avril, on l’espère pour la réouverture de nos clients. Une Pale Ale assez fraiche, assez aromatique, de couleur plutôt claire, avec une belle fraicheur houblonnée. Ensuite, Clem’s, au houblon Mosaic (fruité) avec du blé pour le côté frais et acidulé. A l’automne, Brumaire et Frimaire, notre ambrée au potiron. Cette année, nous n’avons pas pu brasser notre bière d’hiver. Nous travaillons sur une nouvelle recette pour décembre 2021. Des références en épiceries, cavistes, et en bars, avec de plus en plus d’établissements ayant des becs tournants. Des habitudes se sont créées autour de ces bières, qui reviennent. C’est un bon trait d’union entre la gamme permanente et les bières expérimentales.

Quid des nouveautés ?

Nous attendons la réouverture pour affiner les idées de nouvelles bières, comme une blanche de cueillette avec du blé local d’Ile-de-France et des fleurs ou herbes de la région, entre une cervoise et une bière blanche.

L’abus d’alcool est dangereux pour la santé. A consommer avec modération.

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A propos de l'auteur
Journaliste dans la presse professionnelle, j'édite Business & Marchés à titre personnel depuis 2007.
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