Créé il y a vingt ans à Disneyland Paris, le Shaker Challenge a permis aux barmen du resort d’être reconnus pour leurs compétences. Le concours se renouvelle, tout comme l’offre des bars.
« Qui réalisera le meilleur cocktail de Disneyland Paris ? » Charlie Rambeau, en poste au bar Captain’s Quarters de l’hôtel Newport Bay Club, a emporté la dix-septième édition du Shaker Challenge, le concours-métier des barmen et des cuisiniers lancé en 1997 au sein du resort de Marne-la-Vallée.
« En 1996, nous sommes partis du constat que nos salariés étaient rompus aux produits Disney, savaient servir des boissons, mais devaient être reconnus à leur juste valeur et monter en compétences. Les bars n’étaient pas alors une priorité de l’entreprise, mais elle s’est développée. Nous sommes les meilleurs ouvriers de Disneyland Paris. En s’ouvrant sur l’extérieur et en se confrontant avec les professionnels de leur secteur, nos effectifs ont tout gagné », explique René Delvincourt, senior manager Beverage et coordination bars co-wide.
Aujourd’hui, le département Beverage représente 100 millions d’euros de chiffre d’affaires. Disneyland Paris compte 13 bars, qui emploient 400 personnes en haute saison. Nombre de ses anciens collaborateurs, les cast members, ont été débauchés par des établissements prestigieux. Le « Rendez-vous des étoiles », qui a vu s’affronter sept barmen de palaces et d’hôtels 5 étoiles parisiens aux côtés de la gagnante 2015 du Shaker Challenge, Anaïs Breton, s’est ainsi déroulé en présence de trois anciens cast members. « Disney, c’est mon école », souligne Roxanne Remmery, la lauréate de l’épreuve, en poste à La Réserve Paris depuis un an. « Le Shaker Challenge est le premier concours que j’ai réalisé dans le monde du bar. Les concours m’ont beaucoup apporté tant sur le plan personnel que professionnel. Il faut toujours se remettre en question », abonde Christophe Davoine, meilleur ouvrier de France barman 2015, chef barman du Crillon, précédemment au Peninsula, qui a travaillé durant douze ans à Disneyland Paris.
Place à la formation
L’importance accordée à la formation s’est traduite par la première séquence des épreuves finales, dédiée aux apprentis. Ces derniers alternent leurs cours en Mention complémentaire bar (accessible après une première formation en hôtellerie-restauration) et la pratique dans les bars de Disneyland Paris. Après deux mois en poste, le Shaker Challenge constitue leur premier concours avant l’examen final prévu en juin, au terme de la formation. Après des épreuves écrites, les dix candidats finalistes ont dû présenter un cocktail classique revisité (exceptionnellement connu à l’avance), en deux exemplaires, puis tirer et servir la bière à la pression et en bouteille sous le feu de questions techniques des équipes du distributeur Tafanel et de Kronenbourg. « La liste des cocktails est approuvée par l’Association des professeurs enseignants en bar », rappelle Arnaud Godebin, responsable beverage cowide restauration et bars.
Travailler en équipe…
Au cours de la journée, les huit candidats finalistes de la catégorie Elite Bar ont pris le relais autour de créations axées sur les années folles, les speakeasy et la prohibition. Un produit partenaire a été imposé à chaque candidat. Les cuisiniers, qui ont intégré le Shaker Challenge en 2012, ont eux aussi eu le droit à leur concours élite, et se sont également confrontés à leurs collègues par équipes, avec deux barmen pour un cuisinier. Un cocktail alcoolisé devait être préparé, tiré au sort, en accord avec une composition froide créée à l’aide d’un panier imposé. « Nous devons aussi faire monter en compétences nos serveurs », insiste René Delvincourt en évoquant l’épreuve Expérience vin (accords vins et fromages, reconnaissance olfactive de trois cépages, analyse sensorielle d’un vin, ouverture de la bouteille et argumentation commerciale). Le manager regrette que ses équipes ne puissent disposer, actuellement, du titre de sommelier, mais espère bien que cette évolution aura lieu dans l’entreprise.
… et accompagner l’évolution de l’offre
Pour sa vingtième édition, le Shaker Challenge, s’est enrichi d’une nouvelle catégorie, Barista (service et présentation d’un expresso et d’un cappucino, service et explication d’une recette signature à base d’expresso, questions sur le café), sous la houlette de l’équipe de Segafredo Zanetti, dont le contrat avec Disneyland Paris a été renouvelé en mai dernier pour une période de cinq ans, avec un changement de taille : le passage du café lyophilisé au café en grains, dont 60 tonnes seront livrées chaque année. « Nous avons déployé 260 machines expresso sur le resort : il fallait maintenir la rapidité du service. Nous souhaitons initialement nous équiper de percolateurs, mais la mise en œuvre du projet était impossible. Nous avons toutefois réussi une nette montée en gamme, déjà reconnue par nos clients », se félicite René Delvincourt. Un mélange exclusif à Disneyland Paris est servi dans les bars, restaurants et hôtels. Pour l’un des candidats, l’expérience client consistait à « déceler des notes de clous de girofle, puis mélanger un bâton de canelle au café pour une explosion en bouche de toutes les saveurs » – un véritable exercice d’accompagnement au comptoir ou en salle.
« Les guests encouragent notre montée en gamme »
Essentiellement répartis au sein des hôtels, dont la rénovation se poursuit (le Newport Bay Club en 2016, l’hôtel Cheyenne en 2017, le Disney’s Hôtel New York en 2018, le Disneyland Hôtel en 2020), les bars disposent depuis le 1er octobre d’une carte refondue, qui accueille 87 nouvelles références. « Nous avons la chance, à Disneyland Paris, de pouvoir réagir à une situation particulière. Nous répondons à la demande de premiumisation avec des produits qui sont des niches. Les guests ne se plaignent toutefois pas de la hausse de nos tarifs, compte tenu de cette évolution », indique René Delvincourt. Il souhaite développer, en partenariat avec la Walt Disney Company, un concept alliant boissons et food autour du sans-alcool (une tendance forte dans l’univers du bar) et du bien-être. Pour l’heure, une offre de vins bio est désormais disponible à Disneyland Paris.
Le Shaker Challenge s’apprête pour sa part à écrire une nouvelle page de son histoire avec la reprise de son organisation par Arnaud Godebin et Mickael Sachet, small world manager du Café Fantasia (Disneyland Hôtel). Pour son dernier Shaker Challenge, René Delvincourt a fait le show lors d’une soirée de clôture de haute tenue, invitant les convives à dîner dans un Shaker’s Club. « Nous sommes montés très haut dans les concours. Nos effectifs se renouvellent et laissent la place à une nouvelle génération. C’est un nouveau départ », conclut le manager.