Développer la capacité des robots à pouvoir apprendre constitue le principal enjeu des recherches dans ce domaine. Compte-rendu d’une conférence qui s’est tenue au Collège de France.
Non, les robots ne pourront remplacer l’Homme, mais ils constitueront un moyen puissant pour le seconder. Telle est la conclusion que l’on pourrait retirer d’une table ronde consacrée à la robotique, organisée samedi dernier dans le cadre d’un forum organisé par le mensuel La Recherche. Nous devrions passer de 6 millions de robots, toutes machines confondues, à 18 millions en 2020 : s’interroger sur leur développement s’avère essentiel.
Pour le directeur du développement technologique de l’Inria, Bernard Espiau, des limites peuvent être posées entre ce que l’on sait faire dans le domaine de la robotique, et ce qui relève encore du potentiel développement voire de l’imagination. A l’heure actuelle, nous sommes en mesure d’embarquer une puissance de calcul plus grande qu’auparavant, conséquence des avancées technologiques.
Nous pouvons également intégrer un robot dans un système d’information, et dans un environnement spécifique, les capteurs pouvant être reliés entre eux. Cette interaction entre différents appareils permet de développer une véritable complémentarité entre les appareils. Dans le domaine des similitudes avec les comportements humains, nous savons simuler des expressions, et nous assistons à l’émergence de situations qui apparaissent coordonnées.
Des limites peuvent toutefois être posées. Ainsi, on est en mesure de pouvoir sous-titrer de façon automatique un discours, mais pas de l’interpréter de façon fluide, en particulier lorsque la parole est saccadée ou ne répond pas à des standards (les accents régionaux, par exemple). Par ailleurs, enseigner des petits comportements à des robots s’avère pour l’heure impossible, l’enjeu étant de développer des capacités d’apprentissage à ces machines, qui s’adapteraient au fur et à mesure. Un robot « intelligent » serait capable de pouvoir apprendre, communiquer, comprendre, simuler des émotions : cela relève encore de la science-fiction, mais les recherches progressent rapidement.
Des questions liées à l’éthique
Etienne Dombre, directeur de recherches au CNRS, dégage pour sa part deux applications concrètes de ces évolutions : la robotique médicale, et celle destinée à améliorer le quotidien. Dans le domaine de la santé, la rééducation fonctionnelle constitue l’exemple le plus probant de ces innovations, avec l’apparition de prothèses destinées à s’intégrer à notre squelette ou des déambulateurs capables de réorienter un patient. Toutefois, en raison du coût de ces technologies, la recherche et la commercialisation n’ont quasiment pas progressé en trente ans. La robotique d’aide aux médecins représente cependant une voie d’avenir, avec récemment une opération chirurgicale commandée depuis les Etats-Unis avec une patiente à Strasbourg.
Jean-Christophe Baillie, fondateur et directeur scientifique de Gostai, tient à rappeler que la définition de ce qu’est un robot ne fait pas consensus, avec une division possible entre machines autonomes et machines capables d’apprendre. Les machines apprenantes, comme expliqué par les autres intervenants, n’existant pas à l’heure actuelle. Des questions liées à l’éthique vont émerger, toute technologie pouvant être utilisée pour des usages bons ou mauvais, avec les risques plus ou moins grands de dépendance à la technologie, de déshumanisation, de problèmes concernant la vie privée ou de l’équilibre économique (les machines qui travaillent à la place des Hommes, l’économie s’adaptant avec des destructions et créations d’emplois).
L’anthropologue Denis Vidal préfère quant à lui engager un questionnement sur la vie avec des robots pouvant exprimer des émotions et capables d’apprendre, ce qui relève pour l’heure de la science-fiction, mettant en garde sur de potentielles dérives.