La prise en compte de critères extra-financiers tend à s’imposer. Développement durable, éthique, gouvernance: l’ISR recouvre un large champ d’action.
La crise, la période idéale pour inaugurer de nouveaux comportements dans la finance ? Dans ce contexte difficile, l’investissement socialement responsable semble en passe de tirer son épingle du jeu. « En 2008, les encours de nos fonds en actions ont chuté de 30 %, mais ceux des fonds ISR de 4 % seulement », témoigne au Figaro Karina Litvack, directrice de l’investissement durable chez F&C, un gestionnaire britannique. L’engouement actuel pour l’environnement, lié à des problématiques éthiques, incite les professionnels à se pencher sur ce segment. Selon une étude réalisée par le cabinet de conseil Seeds Finance, 71 % des investisseurs institutionnels estiment que la crise les incite à renforcer leurs positions sur l’ISR.
Les professionnels de la gestion d’actifs s’adaptent, comme en témoignent Crédit Agricole Asset Management et Allianz Global Managers, deux sociétés de gestion d’actifs, profitent de ce développement pour réorganiser leurs services dans le but de mieux prendre en compte l’investissement socialement responsable. L’entreprise d’origine allemande collabore régulièrement avec quatre agences de notation extra-financière, chacune spécialisée par acteur, tandis que CAAM a regroupé ses activités liées à l’ISR dans sa filiale spécialisée Ideam. Concernant les critères de sélection, la Financière de Champlain a d’emblée exclu des secteurs entiers tels que l’alcool, le tabac ou la pétrochimie. Chez Allianz, les droits de l’Homme servent notamment de base aux investissements.
L’investissement socialement responsable, qui consiste à intégrer des critères éthiques, sociaux, de gouvernance et environnementaux dans la gestion de portefeuilles et les placements, connaît un développement sans précédent, même si les difficultés des marchés financiers ont affecté cette activité. Les Principes pour l’Investissement Responsable, adoptés en 2006 par les Nations Unies sur la base de critères environnementaux, sociaux et de gouvernance, rassemblent plus de 200 fonds signataires dans le monde, un chiffre modeste mais qui ne prend pas en compte toutes les initiatives. Des fonds socialement responsables ou de développement durable peuvent faire partie de cette stratégie, qui inclut plus rarement des fonds d’exclusion (certains secteurs sont exclus).
Signe de la vitalité de ce créneau, la première émission obligataire orientée ISR, réalisée par la région Nord-Pas-de-Calais en début d’année, a remporté un franc succès. « Les investissements ISR sont réalisés essentiellement via des fonds qui investissent dans des entreprises cotées respectueuses de l’environnement et de leurs salariés. Cette émission obligataire est en quelque sorte un nouveau produit du marché ISR », indiquait récemment à l’Agefi Nicolas Vanhille, de chez Dexia. Afin de pouvoir réaliser des investissements massifs, la région s’est tournée vers les obligations, et a opté pour des critères liés au développement durable afin d’être en phase avec son plan d’action dans ce domaine.
Entre novembre 2007 et novembre 2008, le nombre de fonds ISR a progressé de 23 %. Les critères extra-financiers permettent d’en savoir plus sur les sociétés concernées, une variable essentielle dans le contexte actuel. Le développement de l’ISR reste toutefois relativement timide par rapport à l’enjeu représenté par les notions d’environnement et d’éthique: la variabilité des critères pris en compte selon les sociétés et la faible communication peuvent notamment expliquer ce décalage entre les attentes et les sommes investies.
Proposer des fonds dédiés à l’investissement socialement responsable ne dédouane toutefois pas les établissements financiers d’améliorer leurs comportements, notamment par le biais d’objectifs de protection de l’environnement.