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Pourquoi les Français sont devenus accros au gin

3 min de lecture
Cocktail au gin - Tiger Paris

Auteur de «Gins : 101 façons de vous laisser surprendre»*, Ian Buxton, consultant en spiritueux, décrypte l’engouement des Français (et pas seulement) pour le gin, particulièrement lorsqu’il est dégusté en cocktail.

Vous mettez à l’honneur les entreprises et les gens qui font le gin. Quelle est la motivation de ces hommes?

Ian Buxton — Comme on pouvait s’y attendre, elle varie. Certains entrepreneurs développent une entreprise existante, certaines personnes sont intéressées pour créer quelque chose de nouveau, peu importe le côté financier, tandis que d’autres veulent fonder une marque ou une entreprise durable, peut-être la vendre plus tard ou parfois comme un héritage pour leur famille. Beaucoup de très petits distillateurs peuvent davantage viser un «mode de vie» orienté vers l’aspect local – et je leur souhaite le meilleur, car ils apportent une grande variété et un intérêt les bars et les cavistes. J’ai essayé de mettre en valeur la plupart des entreprises les plus petites; les grandes marques ont beaucoup d’argent pour leur propre promotion!

Pourquoi existe-t-il une telle diversité de saveurs dans le gin?

L’un des aspects les plus attrayants du gin réside dans la gamme de saveurs possibles. Il offre beaucoup plus de goût que la vodka, que les gens trouvent de plus en plus ennuyeuse, mais il est plus sympathique et abordable que de nombreux whiskies, que certaines personnes trouvent plutôt étouffants et intimidants. Parce que la définition légale du gin est assez lâche, les distillateurs ont une grande liberté d’expérimenter et une nouvelle génération de petits distillateurs opère à partir de plantes d’origine locale. Cela ajoute de la variété et de l’intérêt pour les différents gins qui sont disponibles, en encourageant le consommateur à les tester. Mais nous allons aussi rendre hommage à Bombay Sapphire et à Hendrick’s. Il y a près de trente ans, Bombay Sapphire a été l’un des premiers à expérimenter un nouveau style plus léger de gin; Hendrick les suivit après une dizaine d’années et chaque nouveau gin qui est lancé aujourd’hui devrait remercier ces deux entreprises pour avoir brisé la mainmise des gins de genièvre lourds. Rappelez-vous aussi que de nouveaux tonics passionnants apparaissent presque tous les jours!

La France est le troisième pays représenté dans le livre. Comment expliquez-vous le fort développement du gin?

Tout d’abord, la France a une grande culture de distillation de cognacs classiques, avec des styles régionaux d’eaux-de-vie qui donnent aux producteurs de la confiance pour lutter contre cet esprit anglais (ce n’est pas que les distillateurs français manquent de confiance, dois-je rapidement souligner !) Deuxièmement, les règles de production font que de nombreux producteurs de cognac ont leurs alambics en friche pendant des mois de l’année: pourquoi ne pas utiliser cet équipement pour faire quelque chose de différent? Troisièmement, comme dans de nombreux marchés occidentaux, les jeunes consommateurs cherchent quelque chose de différent qui marque leur génération, et le gin a atteint une grande popularité chez les «Millenials». Enfin, je pense que les barmen du monde entier s’ennuient avec l’offre existante en vodka et en gin – il était naturel, pour eux, de travailler avec des distillateurs plus jeunes. Dès lors que les principaux influenceurs de l’univers du bar ont commencé à promouvoir activement ces produits, les consommateurs leur ont emboîté le pas.

Comment l’essor du cocktail et de la mixologie favorisent la consommation de gin?

Cela a été absolument extrêmement important, d’une part aux Etats-Unis, puis en Europe. Les meilleurs barmen spécialisés dans le cocktail sont de grands expérimentateurs et sont toujours à la recherche de nouvelles saveurs à explorer. Bombay Sapphire a eu un grand rôle en cela, avec l’aide du barman londonien Dick Bradsell, qui a conçu le Bramble, un classique moderne qui est à de nombreuses cartes. Par ailleurs, les recettes de cocktails classiques des années 1930 et antérieures ressurgissent. Comme ils ont étudié l’Histoire, ils ont remarqué que la plupart des grands cocktails ont toujours été réalisés avec du gin, pas avec de la vodka (qui a été largement utilisée plus récemment). A cet effet, les distillateurs ont ressuscité d’anciens styles de gin, en ajoutant encore plus d’intérêt et de la variété à ce segment dynamique.

*«Gins : 101 façons de vous laisser surprendre», ed. Dunod, 224 p.

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A propos de l'auteur
Journaliste dans la presse professionnelle, j'édite Business & Marchés à titre personnel depuis 2007.
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