L’Europe lance une opération destinée à accompagner les navires dans le golfe d’Aden. Un soutien qui s’explique notamment par des facteurs économiques.
La politique européenne de sécurité et de défense se concrétise enfin, avec des opérations concrètes. C’est le cas avec Atalanta, un dispositif naval lancé par l’Union européenne et destiné à lutter contre la piraterie au large des côtes somaliennes. Commandé par la Grande-Bretagne, il bénéficiera de 1.000 marins répartis entre huit et dix navires, avec un ou deux moyens aériens. Ce déploiement a pour objectif de stabiliser la situation dans les eaux du golfe d’Aden, qui trainent la réputation d’être les plus dangereuses du monde. « L’opération ne vise pas à faire la guerre à l’ensemble des pirates au large de la Somalie, ni à assurer une mission de police dans la zone, mais à escorter les bâtiments vulnérables« , explique le ministère des Affaires étrangères, conscient de l’immensité des eaux et du flou juridique.
Les récentes affaires s’étant déroulées au large de la Somalie, parmi lesquelles la prise du super-pétrolier Sirius Star, araisonné la semaine dernière au large du Kenya. Ses 330 mètres de long et 300.000 tonnes d’or noir, qui rendent l’embarcation à la fois imposante et susceptible d’attirer les convoitises, ont de quoi prouver que les pirates ne se bornent plus aux navires de taille plus modeste. « Ce ne sont plus de simples opportunistes : leurs opérations sont devenues professionnelles et elles vont encore gagner en sophistication si nous n’apportons aucune réponse« , rappelle l’institut britannique institut britannique Chatham House. Les limites des eaux ainsi que les difficultés liées à l’arrestation des preneurs d’otages rendent cependant complexes une véritable politique dans ce domaine. Pourtant, l’urgence est de mise: entre janvier et septembre, 199 actes de piraterie ont été répertoriés, une liste qui s’est allongée depuis.
Des paramètres économiques en arrière-plan
L’opération européenne constitue donc un effort supplémentaire dans cette lutte contre la piraterie, mais n’oubliera pas les conséquences économiques de ces actes. Le coût de l’assurance d’un cargo transitant par le golfe d’Aden a progressé de manière importante ces derniers mois, les garanties sur les cargaisons devant être assorties de contrats relatifs à la prise d’otages. « De nombreux bateaux ne prennent pas d’assurance. Jusqu’en septembre, nous avions peu de clients dans le domaine maritime. Mais elle est venue nous voir pour nous demander d’adapter notre produit à ses besoins. Depuis, nous sommes submergés de demandes« , indique à La Tribune Guillaume Bonnissent, responsable chez Hiskox, numéro un mondial des assurances kidnapping. Modifier les trajets reviendrait à allonger la durée, et donc le coût, du transport. Si les tankers contournent l’Afrique, ce sont deux semaines de plus qui s’ajoutent à la facture.
A ces difficultés s’ajoute la crise économique, qui induit depuis l’été dernier une chute des cours du pétrole. Or, à chaque nouvelle baisse de la production (dans le but de soutenir les cours), on enregistre un nouveau recul des prix d’affrètement des navires. Le recul des échanges au niveau mondial affecte les transporteurs, qui tentent de rationaliser les dépenses et de se recentrer sur les lignes les plus rentables. « Nous avons la chance d’avoir un réseau planétaire. Du coup, nous avons bien sûr des marchés affectés par la crise mais ils sont compensés par des lignes en pleine expansion au Moyen-Orient et en Afrique de l’Ouest« , ajoute au Figaro Nicolas Sartini, responsable chez CMA-CGM.