Les professionnels réunis au salon des vins septentrionaux Vinovision ont particulièrement axé leurs efforts vers l’export, avec diverses stratégies.
C’est au cœur d’une saison au climat particulièrement frais que s’est déroulée la première édition de Vinovision, le salon des vins septentrionaux (« cool-climate » en anglais), du 12 au 14 janvier à Paris. 380 exposants étaient réunis pour l’événement. « Quand on pense au vin, la référence, c’est la France, et Paris en est la capitale et l’emblème. Or, il n’y avait pas de grand salon dédié aux professionnels dans cette ville, facilement accessible en transports, d’où un emplacement intra-muros, et forte d’une agglomération de 15 millions d’habitants bien pourvue en cafés-hôtels-restaurants. Les interprofessions viticoles du Val-de-Loire, de l’Alsace, de la Bourgogne et le Syndicat général des vignerons de la Champagne se sont associées, et ont convié d’autres régions », explique Pierre Clément, président de l’Association des vins septentrionaux, coorganisatrice de Vinovision.
Le salon, organisé cette année durant les vacances scolaires – d’où, peut-être, des allées clairsemées pour sa première journée – vise notamment les acheteurs étrangers, avec des profils britanniques et américains en vue. 3500 visiteurs ont parcouru les allées du parc des expositions de la Porte de Versailles, dont 17% d’internationaux.
Créée en 2002, la plateforme logistique et commerciale Alliance Loire, qui réunit sept caves coopératives du Val-de-Loire, répond à cet objectif. « Nous avons mis en commun tous nos clients, afin de créer un fonds de commerce global qui a profité à chacune de nos caves. Cela a très bien fonctionné, mais il a fallu unifier tous les systèmes », indique à Business & Marchés Didier Despiau, directeur commercial marché traditionnel. Les 60 appellations sont commercialisées à l’export à hauteur de 20%, 20% sur les marchés traditionnels français, et à 60% auprès de la grande distribution française. Parmi les produits phares, un Crémant de Loire (80% Chardonnay, 20% Chenay), de la maison De Chanceny, était mis en avant.
De belles histoires qui séduisent à l’international
A l’export, raconter de belles histoires est un « plus » pour se démarquer, reconnait l’équipe de 1752 Signature wines, un producteur et négociant qui compte une centaine de références en portefeuille. Lancée à l’automne 2016, sa gamme Madame Veuve Point regroupe 25 vins de Bourgogne produits, après achat des raisins, au sein d’une unité de vinification située à Beaune (Côte-d’Or). Veuve de vigneron en 1903, à l’âge de 26 ans, Jeanne-Marie Point a eu l’occasion, un an plus tard, de présenter ses produits à l’Exposition universelle de Saint-Louis (Etats-Unis), alors dotés d’un Prix d’excellence. La page Facebook associée à la marque remonte à 1904, et compte déjà 2000 amis. Avec la photo de Jeanne-Marie Point située en bonne place sur les étiquettes, la gamme compte s’imposer à l’export et au grand export (Etats-Unis et Asie).
Une histoire d’amitié est quant à elle contée avec passion par Robert Klingenfus, installé à Molsheim (Alsace). La gamme Pur sang de son domaine, immédiatement identifiable à sa bouteille bleue, est liée aux relations privilégiées qu’avaient noué Ettore Bugatti et Charles Klingenfus, son grand-père. Chaque étiquette arbore un modèle de compétition, en hommage à la création d’un véhicule de locomotion, un tricycle à moteur, en 1903. Un gewurztraminer, un Riesling, un Pinot gris, un Pinot noir et un Pinot blanc constituent cette offre « haut de gamme » qui a notamment été dotée, en 2011, d’un coffret métallique tiré en série limitée, à l’instar des bouteilles, produites « seulement durant les bonnes années » et dûment numérotées. Ce récit « plait bien à l’export : Etats-Unis, Chine, Japon… », souligne Robert Klingenfus.
Pour exporter, il convient également de proposer une offre lisible. A Veyre-Monton (Puy-de-Dôme), la coopérative Saint-Verny vignobles, filiale du groupe céréalier et agroalimentaire Limagrain, regroupe 65 vignerons. Dans sa gamme, Le Chardonnay (rejoint par Le Pinot noir) permet de centrer la communication exclusivement autour du cépage : « Puy-de-Dôme, ce n’est pas vendeur ! ». Sa collection « The lost vineyard » rend pour sa part hommage à un journaliste anglais devenu importateur en vins qui s’était aventuré en terres auvergnates, et avait parlé, à son retour, du « vignoble perdu ». Le « 809 Chardonnay » est nommé ainsi en référence à sa variété, et le « 45.3 Sirah » à la latitude.
Une nouvelle place de marché en ligne
En France, la priorité des professionnels est de commercialiser facilement leurs vins ou se fournir rapidement, avec une offre renouvelée. Basée à Lormont (Gironde), la start-up Actiwine, dont les services sont disponibles depuis fin 2015, donne accès à 250 vignerons, et propose aux acheteurs de se faire livrer par les producteurs au moyen d’un processus on-line qu’elle gère complètement, en-dehors du stockage : merchandising des vins sur le site internet, prise de commandes et facturation. « Nous avons plus de 1000 vins, dégustés, sur lesquels nous donnons une information très qualitative. Les acheteurs formulent leurs offres, comme sur une place de marché, aux vignerons, avertis par e-mail ou par SMS. Les négociations s’enclenchent ensuite », explique Eric Lévy, directeur général et cofondateur d’Actiwine, qui compte déjà 12 personnes dont 4 sont dédiées au développement de la plateforme. 600.000 euros ont été levés en 2016. « Nous prélevons une commission, qui est variable, sur les ventes. Les vignerons nous font confiance car ils peuvent sélectionner certaines catégories d’acheteurs, dont nous vérifions le profil avant de leur donner accès au site », poursuit l’entrepreneur.
Se démarquer, une priorité
Sur le front du champagne, Joël Falmet, producteur à Rouvres-les-Vignes (Aube), à la tête du Syndicat général des vignerons de Champagne, observe une demande qui s’exprime en direction « de cuvées plus spéciales, pour sortir de l’ordinaire, avec des vins davantage vieillis en cave afin de se démarquer, ce qui permet d’accroître la valeur du mix produit ». Pour l’édition 2018, le salon Vinovision « montera en gamme », promet, de son côté, Pierre Clément. Le champagne étant un vin effervescent, les organisateurs espèrent que le salon fera des bulles…
A découvrir également
Basée à Saint-Georges-sur-Cher (Touraine), la famille Bougrier, qui produit plus de 50.000 bouteilles par an, s’étend « dans toute la vallée de la Loire, avec des négociants en plus de ses propriétés », souligne son responsable commercial export, Nicolas Bougrier. La nouvelle bouteille carrée de sa gamme Pure Loire accompagne un Rosé d’Anjou 2016 destiné à l’export et aux magasins Auchan. A Ville-sur-Arce (Aube), la maison de champagne Dominique Massin met en avant son Blanc de noirs, « une spécialité de la côte des Bars », 100% Pinot noir. Exception notable au sein du salon, la maison Gratien Meyer (Saumur, en Maine-et-Loire) propose quant à elle, parallèlement à sa gamme de champagne (dont son Brut, sa référence phare), sa marque Festillant, lancée il y a dix ans. Son vin à bulles, désalcoolisé, se décline désormais en version « on ice », à servir sur glace, dans une bouteille blanche adaptée aux bars et discothèques.
L’abus d’alcool est dangereux pour la santé. A consommer avec modération.
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