La dixième édition de Cocktails Spirits a mis à l’honneur l’art du cocktail à la française, ainsi que la créativité et le talent des bartenders.
En dix ans, le cocktail est sorti de sa niche. Avec des bartenders reconnus, des établissements qualitatifs et une créativité constante, sa consommation ne cesse de se développer. Après une décennie d’accompagnement de cet univers, le salon des nouvelles tendances du bar, Cocktails Spirits, a mis en avant cette année les hommes et les femmes qui font vivre la scène cocktail au quotidien – un tour d’Europe sera lancé sur Instagram avec le hashtag #inbartenderswetrust – tandis que les marques présentes ont fait part de nombreux efforts pour faire découvrir leurs produits… jusqu’à un sauna pour le whisky Monkey Shoulder (avec un cocktail notamment composé d’une réduction de malt) ! L’occasion, les 5 et 6 juin, d’arpenter pour la dernière fois les allées de La Maison rouge, la fondation parisienne d’art contemporain qui fermera ses portes à l’automne.
Des cocktails à la française
« En 2007, l’arrivée de l’Expérimental Cocktail Club a permis de faire bouger les lignes. Jusqu’en 2013, Paris se contentait, sinon, de suivre ce qui se faisait à New York et à Londres… puis, petit à petit, un mouvement s’est amorcé avec l’ouverture de bars qui disposent de leur propre personnalité », observe Luc Merlet, responsable marketing et ventes de la maison de cognac du même nom, qui a étendu sa toile dans l’univers de la liqueur et des spiritueux – les produits sont distribués par La Maison du Whisky. Forte de « cinq générations de distillation », l’entreprise suggère aujourd’hui de mixer ses produits, comme en témoigne l’Hope’s Neck : cognac, bitter Angostura, ginger ale Fever Tree, zeste d’orange.
L’apéritif St-Raphaël souhaite lui aussi revenir au goût du jour en cocktail – l’occasion, pour le célèbre bartender Stephen Martin, de faire déguster le Léviathan revisité, qui ne prend pas la forme d’un monstre mais d’un mélange de St-Raphaël rouge (intense et fruité), de gin et de liqueur de Marasquin (à base de cerises aigres, disponible chez Giffard). Stephen Martin, qui a observé avec attention les pratiques de l’apéritif – « personne n’en donne la même définition, et il est souvent cher, résumé à une planche avec de la radio en fond » – lancera prochainement un nouveau concept autour de ce moment de convivialité, Apéro, à l’issue de deux ans de travail. Un livre consacré au bar français est également en préparation.
Parmi la sélection – toujours affûtée – de L’Explorateur du goût, distributeur français créé il y a un an par François Sommer, la vodka Veuve Capet (lancée en 2016 à l’issue de 18 mois de travail) correspond en tous points à cette volonté de redécouvrir le savoir-faire français dans l’univers des cocktails et des spiritueux : il s’agit de la première vodka élaborée à partir de raisins issus de la Côte des Blancs (100% Chardonnay). Les parcelles sont réparties sur trois villages. Pour réaliser un cocktail, focus aussi sur le tonic Archibald : français, biologique, sans quinine, il est proposé par l’équipe de Folle envie, un apéritif faiblement alcoolisé (11,2%), peu dosé en sucre dont la consommation est suggérée avec du tonic et une touche de citron jaune.
Le Bureau national interprofessionnel du Cognac poursuit, pour sa part, ses efforts pour promouvoir son produit auprès des bartenders. Cette année, il a fait appel à un bartender autrichien, Reinhard Pohorec (photo de couverture), qui, seulement âgé de 28 ans, est le plus jeune Cognac educator dans le monde. « Le cognac est étonnamment diversifié. Il offre tellement de nuances et d’innombrables possibilités de mélange ! Aussi, nous devons changer l’image du Cognac, et promouvoir son esprit élégant et floral », explique-t-il avant de servir La vie en rose, un cocktail signature alliant le cognac à un bitter (Peychaud’s), de l’absinthe, du sucre et un zeste de citron. Un short drink était aussi mis en avant (l’East India revisité : cognac, rhum Plantation à l’ananas, bitter Suze, sirop maison de fleurs d’oranger) aux côtés de deux autres recettes, parmi lesquelles le Sidecar, mis en avant par la maison Hine et déjà présenté au public français lors du dernier Paris cocktail festival.
Des nouveautés
Basé à Nuits-Saint-Georges (Côte d’Or), le groupe Pagès Védrenne, qui regroupe « les liqueurs les plus médaillées au monde », vient de recruter le bartender parisien Tristan Simon pour mettre en avant ses produits. Parmi ses crèmes, liqueurs, apéritifs, eaux de fruits ou bien encore rhums disponibles en portefeuille, son équipe met à l’honneur les rhums agricoles Bielle (Marie-Galante), disponibles en blanc et en ambré, avant l’arrivée prochaine de vieux rhums millésimés. Pour découvrir la gamme, place à un daïquiri : rhum Bielle blanc, liqueur de pomme verte et liqueur Aloe. La liqueur Le Birlou vient quant à elle d’adopter un packaging orienté vers l’export, pour mieux faire valoir son univers et ses arômes de pomme et de châtaigne.
A Saint-Léger-des-Bois (Maine-et-Loire), le liquoriste et siropier Giffard s’est quant à lui offert une nouvelle usine et vient de lancer Caribbean Pineapple, une liqueur d’ananas frais Victoria, marié avec du rhum et des épices. Pour adresser le marché du cocktail, l’entreprise propose de préparer un Pineapple Sour : liqueur, bourbon, jus de citron frais, liqueur vanille de Madagascar et Egg white, un sirop au sucre de canne et au blanc d’œuf. Cointreau, pour sa part, a choisi un tout autre moyen de séduire les professionnels : vêtus d’une blouse, comme dans une distillerie, les visiteurs étaient incités à concevoir leur propre cocktail… dans une bouteille géante de liqueur ! Pernod Ricard a, pour sa part, poussé ses rhums Havana Club et Pacto Navio à travers des cocktails dédiés. Avec El Presidente 1815, le brand ambassador de Pacto Navio, Guillaume Guerbois, a allié ce nouveau rhum à du vermouth blanc, du triple sec (liqueur de zestes d’orange) et du sirop de Sauternes.
Au rayon tonics, Schweppes souhaite aussi renforcer ses positions auprès des bartenders avec l’arrivée de nouveautés au sein de la gamme Premium mixer, dédiée aux professionnels. Deux cocktails (gin et tonic, et tonic Hibiscus et mezcal) sont recommandés. Pour le producteur allemand de tonic Thomas Henry, créée en 2010 et déjà distribué dans 40 pays avant d’aborder le marché américain en janvier 2018, les cocktails sont aussi un bon moyen de faire valoir ses nouveautés, à l’instar du Mosel Triangle (gin, jus de citron, espuma de fleurs de lavande) sous la houlette de Guillaume Moutarde, bartender au Maria Loca, dans le 4ème arrondissement de Paris. Les amateurs de sensations plus douces avaient, eux, rendez-vous dans le patio pour découvrir l’Ouro, le cocktail porté par le brand ambassador de la cachaça brésilienne Yaguara, Romain Llobet, avec… du lait concentré et du lait de coco. Résolument disruptif !
L’abus d’alcool est dangereux pour la santé. A consommer avec modération.
La parité à l’honneur
Cette année, le symposium des bartenders P(our) s’est penché sur la question de la parité hommes-femmes. « L’univers du bar suit les tendances et, pour une fois, est en avance sur la cuisine », se réjouit le coorganisateur de Cocktails Spirits, Thierry Daniel. Aux Etats-Unis, l’écart de salaires entre les hommes et les femmes est estimé à 12,3% chez les bartenders, contre 28% chez les chefs cuisiniers. Il faut résorber ces écarts, rappellent les organisateurs du symposium. Environ 25% des participants aux grands concours mondiaux de bartenders sont des femmes.
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